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« Une dame de 99 ans, petite bougie, qui a continué son chemin, toujours vivante » , Anne-Laure Le Mignant, médecin en Ehpad, nous a raconté la difficile gestion de la crise du Covid-19

Publié par Romane TARDY le 24 Juin 2020 à 19:33
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Anne-Laure Le Mignant est médecin gériatre dans l’Ehpad de La Gautrays à Vitré, en Ille-et-Vilaine, Bretagne. L’établissement a subi de plein fouet la crise du coronavirus avec 20 cas parmi ses résidents. Le médecin est revenu pour le Tribunal Du Net sur la gestion difficile de cette crise.

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Les Ehpad, regroupant de nombreuses personnes âgées et à risque, ont été très fortement touchés par l’épidémie du coronavirus. A Vitré, en Bretagne, l’Ehpad de La Gautrays n’a pas été épargné. L’établissement a tenté de gérer la crise au mieux. Anne-Laure Le Mignant fait partie des 7 médecins du pole gérontologique de cet établissement comptant 300 lits. Elle nous a livré un témoignage sur les difficultés de la gestion de cette crise mais aussi son évolution ainsi que les leçons qu’il faut tirer de cette épidémie.

La situation dans l’Ehpad de Vitré : « un cluster à la mi-mars »

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C’est à la mi-mars que le Coronavirus fait son entrée dans l’établissement.  « Nous on a eu un cluster qui est arrivé mi-mars » . Ce cluster se trouvait dans l’USLD, l’unité de soins de longue durée. Le premier cas n’a pas pu être dépisté immédiatement. Pendant 5 jours, il a donc pu transmettre le virus aux autres patients. Toutefois, des mesures avaient été mises en place en amont pour se préparer à la crise, qui est arrivée un peu plus tard en Bretagne. « Il a fallu vider 14 lits pour faire une aile dédiée au Covid, isolée de tout le reste de l’Ehpad, zone dite Covid + «  , explique le médecin. Les personnes infectées y étaient donc transférées au plus vite. « Cette unité a permis d’éviter la catastrophe » , a-t-elle continué.

LA VIDEO DU JOUR A NE PAS MANQUER

La période d’anticipation a fait partie des plus difficiles. Il fallait tout organiser sans savoir comment l’épidémie allait se propager dans l’établissement : « On s’attendait au pire et on jouait un peu contre la montre » , raconte Anne-Laure Le Mignant. Le premier cas est un réel « coup de stress« . « On rentre dans quelque chose et on ne sait pas où ça va, combien on aura de mort, si on va être dépassé » . Cette anticipation a aussi permis des petits miracles : une dame de 99 ans a survécu au Covid-19 : « Une petite bougie, qui a continué son chemin, toujours vivante » .

3 décès dans l’établissement

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20 résidents ont finalement attrapé le virus ainsi que 6 soignants. 3 de ces personnes sont décédées, un chiffre correspondant à la moyenne nationale. Pour les deux premiers, leurs pronostics vitaux avaient déjà été engagés le mois précédent. Pour le troisième, la situation était plus délicate : il a développé une forme inflammatoire du virus très grave. Ce patient a marqué la docteur : « En huit jours plus rien ne fonctionnait ni son rein ni son cœur« . Tout a été mis en oeuvre pour « qu’il puisse partir le plus sereinement possible » .

Une nouvelle gestion des soins et solidarité en Ehpad

Pour gérer la crise, il a fallu adapter les méthodes de soins et cela peut prendre beaucoup de temps. « Au début on mettait deux fois plus de temps à voir quelqu’un » , se remémore le médecin. De nombreuses mesures d’hygiène sont à respecter et il faut les expliquer aux patients. « On expliquait à chaque fois qu’on rentrait dans la chambre pourquoi on était masqué. Très vite ils se sont habitués et on a réussi à retrouver un lien » , s’est-elle réjouit. L’Ehpad était équipé en matériel pour faire face à ces besoins. « La direction a répondu positivement et mis les moyens qu’il fallait pour qu’on puisse travailler sereinement » , affirme-t-elle. Le personnel soignant a été, en effet, renforcé.

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De cette coordination a débouché, une solidarité inédite. « On sait pourquoi on est là, on était très solidaire. On était déjà proche on l’est encore plus maintenant » , a agréablement remarqué le médecin. De même, chacun participait à informer au mieux les familles des patients chaque jour. La réussite du collectif est pour la docteur le plus important à retenir : ces difficultés ont montré la « force du collective, l’envie de se battre pour que nos résidents soient pris en charge le mieux possible » .

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« Si tu as le Covid on l’a tous, on est une famille »

Les médecins avaient passé le cap où ils n’avaient plus peur pour eux mais pour leur famille. Anne-Laure Le Mignant a alors vécu à distance des siens pendant une dizaine de jours : « J’ai vécu à un mètre de ma famille pendant 10 jours, sans contact. Au bout de 10 jours, on s’est dit c’est plus possible. Mon mari m’a dit cette phrase que je n’oublierai pas : Si tu as le Covid on l’a tous, on est une famille, je me suis marié avec un médecin, je sais aussi les enjeux » .

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Cet engagement a aujourd’hui payé : « Nous sommes très heureux de pouvoir dire qu’à compter du 22 juin, nous n’aurons plus de restrictions de visite, il n’y a évidemment plus de cas. On a un Ehpad déconfiné et ouvert, c’est notre plus grande joie » .

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