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Christian Quesada : son profil psychologique inquiétant passé au crible par les experts

Publié par Claire JONNIER le 12 Avr 2019 à 7:33

Le 27 mars dernier, le scandale éclate. Le maître incontesté des 12 coups de midi qui s’était illustré durant 193 émissions est inculpé pour « détention d’images pédopornographiques » et « corruption de mineurs ». Très vite, les preuves s’accumulent et les témoignages accablants viennent alourdir un peu plus le sentiment de colère et de culpabilité qui pèse sur les épaules de ceux qui l’ont côtoyé.

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Mais ce qui domine, c’est surtout l’incompréhension. Car derrière la personnalité publique presque attachante de Christian Quesada, se cache une sombre réalité, passée inaperçue pendant de longues années. Et c’est exactement ce qu’explique le psychiatre Paul Bensussan qui donne une première ébauche de son profil psychologique : “Les sujets pervers au sens psychologique du terme ont une façade absolument clean et insoupçonnable derrière laquelle, grâce au clivage, coexiste une autre façade, beaucoup moins avouable. Vous avez tous en tête ces reportages où on entend les gens dire ‘Mais je ne comprends pas, il était très gentil. C’est absolument typique de ce genre de double-vie.”

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Une jeunesse marginale

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Pour bien comprendre les mécanismes de la perversion, nous pouvons nous imaginer un enfant de 3 ans qui ne tolère pas la frustration. Capricieux, pétri d’orgueil, il réussira toujours à nier la réalité qui le dérange pour qu’elle corresponde à ses désirs. C’est le fameux mécanisme de déni qui mène au clivage, une sorte de double réalité psychique. C’est ce qui leur permet de manipuler le discours mais également les apparences.

« Ce sont des adultes qui ont les mêmes réactions qu’un enfant de 5 ans qui aime arracher les pattes des mouches sans réaliser que cela lui fait mal. Ils ne sont pas capables de voir la souffrance de l’autre. Ils ne le respectent pas et vont chercher à satisfaire leurs besoins à ses dépens », Isabelle Nazare-Aga, psychologue clinicienne et auteure des Manipulateurs sont parmi nous.

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Dans le cas de Christian Quesada, nous apprenons qu’il est le dernier enfant d’une fratrie composée de quatre garçons. Son père travaillait en Algérie puis ensuite à la RATP à Paris. Quant à sa mère, elle était coiffeuse mais cesse son activité pour s’occuper de ses garçons. Et très vite, ses frères font des carrières brillantes puisque l’un termine directeur d’une agence immobilière et l’autre a fait l’ENA. Seulement apparemment, le vainqueur des 12 coups de midi ne rentrait pas dans le moule.

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« J’étais ce qu’il est convenu d’appeler un élève surdoué. À 9 ans, je participais à des compétitions de Scrabble. J’ai sauté une classe en primaire, mais je n’étais vraiment pas fait pour l’école. Adolescent, je suis devenu ingérable, le genre à ne choisir que les cours qui lui plaisent. Au lycée Descartes d’Antony, je m’étais fait un look rebelle avec les cheveux en pétard, habillé en corbeau. En bon fan des Cure, j’écrivais des poèmes mortifères. J’étais en seconde avec Elie Semoun et Muriel Cousin. Pour moi, l’école s’est arrêtée à 15 ans et demi. »

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Une soif de reconnaissance

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Or, du côté d’Elie Semoun, ce n’est pas vraiment le même son de cloche. « C’était le teubé de la classe ! Tout le monde se foutait de sa gueule, il était super bizarre ! ». Des propos qu’il tient en 2017 et sur lesquels le principal intéressé est immédiatement revenu pour donner sa version des faits : « En classe, on était plutôt bons potes et on était originaux tous les deux. Le débile de la classe, je ne pense pas, mais c’est vrai que j’avais un état d’esprit un peu marginal déjà à l’époque mais on s’entendait plutôt bien ».

Si cette anecdote ne suffit certainement pas à dresser un profil, elle permet tout de même de donner un premier aperçu de la personnalité de Christian Quesada : « un élève surdoué », « pas fait pour l’école », « les cours qui lui plaisent », et bien évidemment, la référence à Elie Semoun.

Or, Alexandra Rivière, psychologue et conférencière, nous apprend que ce sont souvent des personnalités en « quête perpétuelle de plus de pouvoir, de reconnaissance et d’argent », quitte à employer tous les moyens qu’il faut pour y arriver.

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Entre ombre et lumière, un personnage sulfureux

 « Je voulais devenir président de la République », Christian Quesada.

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Mais très vite, Christian Quesada dérape à la suite du suicide de son frère. Il se lance donc à corps perdu dans l’émission des Chiffres et des Lettres. « C’était le 4 février 1987, j’avais 22 ans et c’était au sporting de Monte-Carlo avec Patrice Laffont » se remémore-t-il. C’est la première fois qu’il s’illustre à la télévision puisqu’il finit par emporter la Coupe des Champions (1987), les Masters (1989) et de la Coupe des Clubs (1991).

« Ma première télé. Je suis exactement à l’endroit où je voulais être. Je me sens à ma place. Enfin. »

Or, du côté de Patrice Laffont, la participation de Christian Quesada n’est pas vraiment un bon souvenir. « Je ne le sentais pas, ce type. C’est un emmerdeur, un personnage sulfureux et un manipulateur extraordinaire. Il voulait revenir une nouvelle fois dans l’émission, mais j’ai fini par l’écarter. Il était même blacklisté. J’avais mis une croix définitive et interdit à mes collaborateurs de le reprendre. Pour lui, la porte était fermée. »

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La descente aux enfers

On retrouve ici un trait de personnalité caractéristique des pervers qui est celui de la manipulation. Mais là encore, pour Isabelle Nazare-Aga, « il y a une grande différence entre faire de la manipulation de temps en temps et être manipulateur. » Et même si avec Christian Quesada, nous serions plutôt du côté manipulateur, rien ne permettait à l’époque d’identifier la part d’ombre du personnage.

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En revanche, suite à ces événements, l’homme de 54 ans subit une véritable descente aux enfers. « J’ai eu des démons qui m’ont gangrené pendant deux ans. Il y avait beaucoup de fêtes à la maison, beaucoup d’alcool, de drogue… Ça m’a fait perdre pied. Puis j’ai cumulé les dettes, mon appartement s’est délabré, j’ai été foutu dehors et je me suis retrouvé à la rue, sur un matelas dans une station-service. »

C’est à peu près à cette même période que la justice commence à mettre la main sur des images pédopornographiques à son domicile et où il est également inculpé pour corruption sur mineur et exhibition sexuelle en 2001,2003 et 2009.

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La transgression de la loi et de la figure d’autorité

« (Le pervers) ose transgresser la loi, l’autorité, la morale, la fameuse “figure du père” », Antoine Spath, psychologue.

Personnalités toutes-puissantes et qui se croient tout permis, ils sont incapables de se plier sous une loi commune puisque seule celle de leurs désirs prévaut. Voilà pourquoi, ils réussiront à merveille à se jouer de l’autorité pour pouvoir assouvir leurs propres fantasmes en défiant la morale. D’ailleurs, c’est exactement ce que son ancien ami pointe lorsqu’il explique que Christian Quesada se vantait de sortir avec des filles bien plus jeunes que lui.

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 « Il ne se cachait pas. Il avait même bien soin de rappeler, toujours sur le ton de l’humour, qu’il vérifiait toujours que ces jeunes filles ont au moins 15 ans et trois mois, puisqu’il semblerait qu’en France, ce soit la majorité sexuelle. On va dire qu’il était dans la légalité de la justice. Maintenant, est-ce que quand on a 29-30 ans, c’est moral de désirer des jeunes filles de 15 ans ? »

En trame de fond, il s’agit donc d’un affront direct au système judiciaire français puisqu’effectivement il tient compte des lois établies tout en pointant leur défaillance vis-à-vis de la morale. Comme s’il s’agissait de défier l’autorité paternelle tout en pointant sa faiblesse.

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Une manipulation dévastatrice

Mais le vainqueur des 12 coups de midi a fait pire ! En s’affichant sur TF1 dans un programme familial aux côtés de Jean-Luc Reichmann il réussit à duper tout le monde, y compris le présentateur avec lequel il entretenait des relations très proches. D’ailleurs, il avait pour ambition de co-animer une émission avec lui. Ignorait-il que l’animateur est aussi le papa d’une famille recomposée de 6 enfants ? Ignorait-il qu’il interprétait aussi à l’écran le rôle du célèbre Léo Mattei, commandant de la brigade des mineurs sur Paris dans la série de TF1 ?

Si rien ne permet de l’affirmer aujourd’hui, la question se pose. D’autant qu’en ce qui concerne la perversion, leur seule raison d’être reste de « se rendre valables en nous écrasant pour se sentir supérieurs. Ils sont comme des virus. Ils distillent le mal auprès de plusieurs victimes à la fois – leur époux(se), leurs enfants, le boulanger…- Vous n’êtes qu’un pion sur lequel ils s’appuient pour se valoriser ». Vous devenez alors « des complices, des compagnons de transgression », comme le remarque le psychanalyste Jean-Claude Liaudet.

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 « Suite à la nouvelle dévastatrice que l’on a tous découvert hier (…) je suis ce matin sous le choc et je ne peux qu’exprimer mon sentiment d’horreur, de dégoût et de colère. » Jean Luc Reichmann

« J’avais du respect pour lui et ce qu’il représentait. Je me suis pris une claque, parce que j’ai le sentiment d’avoir été manipulée », Emeline, candidate aux 12 coups de Midi et victime de Christian Quesada.

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Pervers ou pédophile ?

Dès les premières semaines, le mot pédophile revient plusieurs fois dans la presse concernant l’affaire Christian Quesada. Et si effectivement, il semble plus particulièrement attiré par les jeunes filles, le diagnostic n’est pas si évident. En effet, et contrairement à ce que l’on croit, les pédophiles n’aiment pas être exposés. Au contraire, ils ont en général parfaitement conscience que l’attirance qu’ils éprouvent pour les enfants n’est pas saine et n’ont pas de mal à consulter, ce qui n’est absolument pas le cas du pervers.

« On pense, à tort, que les pédophiles éprouvent de la satisfaction et du plaisir dans ce qu’ils vivent. Dans la plupart des cas, c’est faux. D’ailleurs, la majorité d’entre eux est en demande de soins et souhaiterait s’en sortir, je le constate tous les jours dans mon cabinet où la moitié de ma patientèle est constituée de personnes pédophiles qui viennent d’elles-mêmes. » Inès Gauthier, psychologue clinicienne, spécialisée en psychocriminologie et prise en charge des victimes et auteurs de violences sexuelles.

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Or, dans le cas de la perversion, on peut également trouver une teinte pédophile. En langage psy, on préfère parler d’un choix d’objet puisque l’autre n’est plus perçu comme une personne par le pervers mais bien comme le moyen d’atteindre sa propre jouissance. « Ils vont alors chercher à assouvir leur plaisir en faisant du mal à l’autre, en le rendant objet, et en faisant de cet autre leur chose ».

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En attendant les conclusions de l’enquête

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Évidemment, rien ne permet pour l’instant d’affirmer que Christian Quesada se situe dans ce registre puisque l’enquête est toujours en cours. En revanche, ce qu’il est possible de repérer, ce sont ses victimes qui sont en général des jeunes filles mineures. Par ailleurs, on notera également son goût pour « l’exhibition » et ses demandes troublantes faite à ses victimes comme des photos de nombril ou de pied. Ici, on se rapproche tout de même dangereusement « d ’une déviation par rapport à l’acte sexuel normal » et du tableau dressé par le DSM (Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux) qui fait autorité en psychiatrie. En effet, au chapitre les troubles « paraphiliques » , on trouve justement le voyeurisme, l’exhibitionnisme mais également la pédophilie et le fétichisme.

Pourtant, le mystère reste entier, puisque normalement, le pervers cherche toujours à agir dans l’ombre pour conserver « la belle image de lui » . Mais là encore, Paul Bensussan explique :  « Quand vous êtes connu, normalement vous ne vous exposez pas trop. Mais à un moment donné les barrières tombent, notamment quand vous êtes derrière un écran. La force du fantasme de la pulsion abolit la notion de risque et fait faire à l’individu à peu près n’importe quoi.

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