Icône menu hamburger Icône loupe de recherche
  1. TDN >
  2. Cinéma

« Avatar 3 » : un spectacle qui se savoure… même quand l’histoire patine

Publié par Killian Ravon le 19 Déc 2025 à 8:03

À peine les lunettes 3D posées sur le nez. On retrouve Pandora et Avatar comme si on ne l’avait jamais quittée. Et pendant 3 h 17, James Cameron parvient à faire oublier la durée, non pas grâce à une intrigue renversante. Mais grâce à une expérience de cinéma totalement immersive.

La suite après cette publicité
Silhouette d’une Na’vi brandissant des armes devant un brasier, scène rituelle et guerrière dans Avatar 3, ambiance feu et cendres.
Une séquence marquante d’« Avatar 3 », où le feu devient un symbole de pouvoir et de rupture sur Pandora. Crédit : Bande-annonce officielle Avatar 3

Reste une question, plus piquante qu’il n’y paraît : est-ce que ça suffit, à elle seule, à faire un grand film ?

La vidéo du jour à ne pas manquer
« Public équipé de lunettes 3D pendant une projection, ambiance salle obscure, image d’archive en noir et blanc ».
« Public équipé de lunettes 3D pendant une projection, ambiance salle obscure, image d’archive en noir et blanc ». Crédit : The National Archives UK
La suite après cette publicité

Le vrai « retour à Pandora » se joue dès la première minute

Il y a des suites qui prennent le temps d’installer leur monde. Ici, on a plutôt la sensation d’un plongeon immédiat, comme si le film misait sur un réflexe collectif. Pandora est devenue un endroit familier, presque un repère. Le tour de force, c’est cette impression de continuité, très physique, très sensorielle, qui s’installe en quelques secondes.

Le premier opus, en 2009, avait marqué les esprits en faisant de la 3D un argument de mise en scène. Pas un gadget. Le deuxième, en 2022, avait déplacé le centre de gravité sous l’eau. Avec un bestiaire et des séquences aquatiques qui donnaient l’impression d’entrer dans un autre film à l’intérieur du film. Ce troisième volet pousse encore plus loin la logique : la mise en scène semble parfois conçue pour la profondeur de champ, le relief, la perception des distances, comme si l’image cherchait en permanence à « attraper » le regard.

Et c’est précisément là que Cameron reste redoutable. Même quand l’action s’emballe, même quand les scènes s’enchaînent, on a rarement cette sensation de flou ou de fatigue visuelle qui guette certains longs métrages en relief. Le film se vit comme une attraction, mais une attraction réglée au millimètre.

La suite après cette publicité
Acteur en combinaison de motion capture sur un plateau, marqueurs visibles, coulisses technologiques d’un film à effets spéciaux
« Acteur en combinaison de motion capture sur un plateau, marqueurs visibles, coulisses technologiques d’un film à effets spéciaux ». Crédit : Motones

Une 3D « travail d’orfèvre » qui transforme chaque scène en manège maîtrisé

Il y a un plaisir presque enfantin à être « embarqué » par l’image. Dans cet épisode, la 3D immersive devient une sorte de langage à part entière, et pas seulement un habillage. Le film joue avec les trajectoires, les vitesses, les changements d’échelle, et cette façon de faire passer le spectateur du statut d’observateur à celui de passager.

La suite après cette publicité

Les vols sur les Ikran, les séquences de combat, les moments plus mystiques où les personnages se connectent à leur monde… tout est pensé pour être ressenti, pas seulement regardé. Certaines scènes donnent même l’impression d’être filmées avec une caméra « embarquée », comme si on suivait les mouvements au plus près, avec une nervosité contrôlée.

C’est aussi ce qui rend la durée étonnamment digeste. Sur le papier, 3 h 17, c’est long. En salle, on ne s’ennuie pas, parce que le film est construit comme une succession de pics sensoriels, d’images fortes, de séquences qui relancent l’attention. Dit autrement : le film sait parfaitement quand appuyer sur l’accélérateur, et quand offrir une respiration.

Lunettes 3D posées sur une surface claire, accessoire de cinéma pour projections en relief, gros plan net et lumineux
« Lunettes 3D posées sur une surface claire, accessoire de cinéma pour projections en relief, gros plan net et lumineux ».
La suite après cette publicité

De nouveaux visages, de nouveaux terrains… et une menace qui attire l’œil

Cameron ne se contente pas de recycler des paysages déjà vus. Le film introduit un nouvel antagonisme très marqué, avec le Peuple des Cendres, les Mangkwan, menés par Varang. Tout, dans leur esthétique, est conçu pour produire une réaction immédiate : peintures rouges et noires, plumes, rapport au feu, et une présence qui tranche avec les codes plus « organiques » et fluides des clans déjà rencontrés.

Le film élargit aussi la carte de Pandora. Les lieux de confrontation se diversifient, on quitte certains repères installés précédemment, et l’on découvre d’autres espaces de bataille, notamment sur les navires des Marchands de Vent, ou dans Hell’s Gate, la colonie humaine où se concentrent militaires et employés de la RDA. Il y a même, dans cette incursion chez les humains, une petite saveur de récit d’infiltration qui évoque les grands classiques de la science-fiction populaire.

C’est là que l’univers gagne en densité. Même si l’histoire n’avance pas toujours avec la même force, le décor, lui, raconte constamment quelque chose. Et ce détail que peu de gens remarquent au premier visionnage, c’est à quel point le film sait « occuper » l’image : il y a presque toujours un élément vivant, un mouvement, un relief, une profondeur qui empêche la scène d’être plate.

À lire aussi

La suite après cette publicité
Paysage naturel recouvert de cendres volcaniques, sol gris, reliefs sombres, sensation de “feu et cendres” après éruption
Paysage naturel recouvert de cendres volcaniques, sol gris, reliefs sombres, sensation de “feu et cendres” après éruption ». Crédit : Boaworm

Quand le scénario répète des motifs… le film compense en émotions et en discours

C’est aussi là que « ça coince », un peu. Le récit reprend directement après les événements du deuxième volet. Jake Sully, Neytiri et leurs enfants, biologiques et adoptifs, sont réfugiés chez une tribu de l’eau, les Metkayina, et ils doivent vivre avec le deuil de Neteyam. Le colonel Quaritch revient à la charge, déterminé à retrouver Spider et prêt à tout pour capturer Jake, pendant que les humains préparent une attaque dévastatrice contre les Tulkun.

La suite après cette publicité

Sur le papier, il y a matière à intensifier la tension. À l’écran, la sensation est parfois celle d’un récit qui tourne autour d’enjeux déjà connus. Les thèmes sont martelés : la famille, la paternité, la communauté, l’acceptation des différences, et l’idée qu’on peut se construire au-delà du sang. On retrouve aussi les grands messages sur la protection de l’environnement, qui servent de colonne vertébrale morale à l’ensemble.

Mais le film insiste souvent avec des échanges très appuyés, des phrases qui sonnent comme des slogans émotionnels, des déclarations destinées à faire vibrer la corde dramatique. Certaines scènes semblent calibrées pour déclencher le frisson ou la larme, quitte à paraître un peu mécaniques.

Le résultat, c’est un mélange paradoxal : on peut trouver le scénario moins inspiré, tout en se laissant porter. Parce que même quand l’écriture est prévisible, le film conserve un sens du rythme qui « tient » le spectateur. Et parce qu’il y a cette sensation de grandeur, de blockbuster, de spectacle total, qui donne l’impression d’assister à un événement.

La suite après cette publicité
Vue aérienne d’une canopée tropicale dense, feuillage vert continu, atmosphère d’exploration et de monde luxuriant
« Vue aérienne d’une canopée tropicale dense, feuillage vert continu, atmosphère d’exploration et de monde luxuriant ». Crédit : CSIRO / Robert Kerton

Un grand spectacle qui ne cherche pas à être subtil… et qui assume la démesure

Il serait facile de reprocher au film ses gros sabots, ses grandes idées affichées, ses oppositions morales très nettes. Mais ce serait aussi oublier l’intention : Cameron fabrique un cinéma qui vise la démesure, le vertige, la plongée dans un autre monde. Son talent, ici, c’est de transformer Pandora en terrain de jeu visuel, et de donner l’impression que chaque plan a été travaillé pour justifier l’expérience en salle.

Et c’est probablement la vraie raison pour laquelle on ne regarde pas sa montre. Le film déroule une succession de moments « waouh », de séquences d’action, de cérémonies, de batailles, de paysages, qui fonctionnent comme un carburant permanent. On peut ne pas être passionné par chaque rebondissement, mais on reste accroché à l’image.

La suite après cette publicité

Mais saviez-vous que c’est justement ce type de film qui divise le plus ? Pas parce qu’il serait raté, mais parce qu’il oblige presque à choisir ce qu’on attend du cinéma : une histoire brillante, ou une expérience sensorielle totale.

Et au bout du compte, c’est là que se cache la comparaison la plus juste, celle qui résume le sentiment laissé par ce troisième voyage : on sait que tout n’est pas finement équilibré, on sait que l’intrigue n’est pas le plat le plus travaillé… mais on ressort avec l’impression d’avoir dévoré un spectacle, avec un plaisir très immédiat.

C’est seulement après coup qu’on réalise pourquoi : « Avatar 3 » procure un plaisir de consommation instantané, irrésistible, et pas forcément “bien écrit” — exactement comme un fast-food au cinéma : on sait que ce n’est pas très “bon pour la critique”, mais c’est franchement bon sur le moment.

La suite après cette publicité