Pesticides, sel, sucre : les concentrés de tomate pointés du doigt par 60 Millions de consommateurs
Dans ses rayons « sauces », le supermarché cache parfois de mauvaises surprises. Selon une récente enquête de 60 Millions de consommateurs, plusieurs concentrés de tomate vendus en France cumulent résidus de pesticides, trop de sucre et excès de sel.
Un combo qui interroge sur un produit censé simplement « booster » le goût de nos plats. Voici ce que révèle l’étude, et les références les plus mal notées.
Pourquoi le concentré de tomate pose question dans les placards
Le concentré de tomate est cette préparation très réduite et épaisse, utilisée en petite quantité pour donner du relief à une sauce, un ragoût ou une bolognaise. L’astuce est simple : on ouvre un tube, on incorpore une noisette et le tour est joué. Mais l’apparente simplicité de ce produit occulte une réalité moins ragoûtante. Dans sa dernière enquête comparative, 60 Millions de consommateurs a passé au crible une trentaine de sauces tomate industrielles, dont cinq concentrés, et recherché jusqu’à 650 molécules de pesticides.
Résultat : nombre d’échantillons contiennent des résidus, parfois même des substances interdites dans l’Union européenne. Plus gênant encore, le magazine relève une tendance généralisée au surdosage en sucre dans l’ensemble des concentrés analysés, et, pour certaines références, à l’excès de sel. Une combinaison délétère quand on sait que ces produits servent de base à de nombreux plats du quotidien. Mais saviez-vous que ces écarts peuvent aussi masquer des origines de tomates pas toujours conformes à l’étiquetage ?
Crédit : Wolfmann / Wikimedia Commons (CC BY-SA 4.0)
Une méthodologie serrée, des découvertes dérangeantes
Pour bâtir son classement, le magazine édité par l’Institut national de la consommation a évalué les produits sur plusieurs axes : présence de pesticides, type et nombre de résidus détectés (avec un focus sur les molécules interdites), analyse nutritionnelle (sucre, sel, profil global) et cohérence de l’origine des tomates. Ce dernier point a pesé lourd : quand l’origine déclarée sur l’emballage ne correspond pas à l’origine retrouvée par analyse, la note globale est abaissée d’office à “insuffisant”. Le message est clair : au-delà de l’hygiène et de la nutrition, la transparence compte. Et c’est précisément là que la filière industrielle se retrouve sur la sellette, l’étude expliquant que des tomates présentées comme italiennes pourraient en réalité provenir de Chine, ce qui pourrait expliquer, par ricochet, la présence de molécules bannies en Europe dans certains échantillons.
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Trop de sucre (et parfois trop de sel) : l’autre angle mort des concentrés
On n’y pense pas toujours, mais une simple cuillère de concentré de tomate peut surcharger une recette en sucre. Dans ce panel, tous les concentrés évalués par 60 Millions affichent une teneur excessive. Si le sucre joue bien un rôle technologique (équilibre de l’acidité, conservation), sa surutilisation dans un produit aussi concentré dérape vite côté nutrition. Et les choses se gâtent pour certaines marques qui, en plus du sucre, cumulent un taux de sel très élevé. Additionnez à cela les résidus de pesticides détectés, et vous obtenez un profil qui n’a plus grand-chose d’une « petite aide culinaire » anodine.
Crédit : Jon Sullivan
Les références de concentrés de tomate les moins bien notées
Quatre produits se détachent… par le bas. Le Double concentré de tomates Eco+ (E.Leclerc) hérite de la pire note, 5,4/20, avec un carton rouge général sur les pesticides, le nombre de résidus et la présence de molécules interdites. Il cumule aussi trop de sucre et trop de sel, deux critères jugés « très insuffisants ».
Le Double concentré de tomates Auchan s’en sort à 8,1/20 : insuffisant sur les pesticides, très insuffisant sur le nombre de traces et insuffisant sur la recherche de molécules interdites. Il est également beaucoup trop sucré. À noter : le magazine précise qu’il n’est plus fabriqué, même si des stocks peuvent encore traîner en rayon. Autrement dit, vigilance si vous tombez dessus.
Le Double concentré de tomates Priméal obtient 8,9/20. Cas plus nuancé : l’appréciation globale sur les pesticides est positive, tout comme le nombre de traces retrouvées, mais des résidus de pesticides interdits en UE ont tout de même été détectés, ce qui plombe sa note. Côté nutrition, c’est “insuffisant”, avec trop de sucre et trop de sel.
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Enfin, le Double concentré de tomate Léa Nature Jardin Bio frôle la moyenne avec 9,9/10 selon le relevé rapporté, tout en étant pénalisé par la détection de pesticides interdits dans l’Union européenne et par une teneur en sucre trop élevée (un constat partagé par l’ensemble des concentrés analysés). Cette proximité de la moyenne n’efface pas les réserves pointées par l’enquête.
Crédit : Giacinto Lo Meo / Wikimedia (CC BY-SA 2.0)
Origine, étiquettes et confiance : ce que révèle la filière
Au-delà des notes, l’enquête soulève un problème de traçabilité. Lorsque l’origine italienne revendiquée ne colle pas à ce que les analyses révèlent, c’est toute la chaîne de confiance qui vacille. L’Italie est le berceau du concentré de tomate moderne, et l’évocation « pomodoro » rassure. Si des flux d’approvisionnement plus lointains s’invitent sans clarté sur l’étiquetage, le consommateur perd ses repères et, potentiellement, s’expose à des réglementations phytosanitaires différentes. Cette opacité pèse lourd dans la balance du magazine, qui abaisse automatiquement la note. Ce détail que peu de gens connaissent : certains pays exportent surtout de la purée ou du concentré en vrac, qui est ensuite reconditionné ailleurs – d’où l’importance de l’origine matière plutôt que de la simple mise en pot.
Crédit : Leslie Seaton / Wikimedia (CC BY-SA 2.0)
Comment cuisiner malin sans alourdir l’addition santé
Bonne nouvelle : il existe des gestes simples pour retrouver le goût de la tomate sans importer ses angles morts. D’abord, dosage et fréquence. Un concentré n’a pas vocation à sucrer une sauce : si le goût vous semble trop acide, essayez d’allonger la cuisson pour laisser caraméliser naturellement les sucres de la tomate, ou ajoutez une pincée de bicarbonate pour corriger l’acidité plutôt qu’une cuillère de sucre. Ensuite, pensez aux herbes (origan, laurier, thym) et à l’huile d’olive pour arrondir le profil sans sel supplémentaire.
Autre piste : miser sur une base maison ultra-rapide avec des tomates concassées de bonne qualité et un mini-mijotage. Oui, c’est un peu plus long qu’un coup de tube, mais le profil nutritionnel s’en ressent. Enfin, si vous continuez d’acheter du concentré, privilégiez des références peu sucrées et moins salées, et surveillez la liste d’ingrédients : plus elle est courte, mieux c’est.
Crédit : terri_bateman / Wikimedia
Ce que l’on doit retenir avant d’ajouter “une noisette” à la casserole
L’enquête de 60 Millions de consommateurs trace un tableau sans concession. Le sur-sucrage est généralisé dans les concentrés testés. Des excès de sel s’ajoutent parfois, et des résidus de pesticides, y compris interdits en UE, ont été détectés dans plusieurs références. Certains écarts d’origine questionnent la transparence de la filière. À l’échelle d’une semaine, ces « petits plus » s’additionnent dans l’assiette : surveiller étiquettes et quantités n’a donc rien d’accessoire.
D’ailleurs, un détail qui change tout en cuisine : revenir à une réduction maison de tomates mûres peut vous donner une saveur plus dense, sans sucre ajouté, en dix à quinze minutes de feu doux. La révélation finale de l’étude tient en une phrase : tous les concentrés de tomate du panel contiennent trop de sucre – même ceux qui s’en sortent mieux sur les pesticides.