« Je n’arrivais pas à y croire » : après son accouchement, une candidate italienne découvre la solution trouvée par l’université
Le 26 août, Laura Laganga Senzio accueille son fils Raffaele à l’hôpital San Marco de Catane. À 33 ans, cette Italienne pensait enchaîner avec un autre moment décisif, mais sur un tout autre registre. Le lendemain devait se tenir l’oral d’un concours d’entrée universitaire qu’elle préparait depuis des mois.
Le calendrier a basculé en quelques heures. Entre la fatigue, l’émotion et les soins post-nataux, la jeune maman s’est convaincue qu’il fallait renoncer. Elle s’est dit que l’occasion d’intégrer la formation lui passerait sous le nez, sans possibilité de rattrapage immédiat.
Un parcours déjà bien engagé
Avant la naissance de son enfant, Laura Laganga Senzio n’en était plus à la phase de découverte. Professeure de droit et d’économie dans des lycées en Toscane, elle s’était inscrite à un cursus spécialisé pour enseignants à l’Université Kore d’Enna (UKE), au cœur de la Sicile. Les épreuves écrites avaient été validées. Il ne restait plus que l’épreuve orale, celle qui fait la différence.
Cette étape finale concentrait des semaines de préparation. Dossiers relus, notions révisées, exemples pédagogiques peaufinés, tout était prêt. Puis la maternité s’est invitée dans l’équation, bousculant les certitudes et l’ordre du jour.
Quand la vie personnelle et les études se percutent
La situation résume un dilemme fréquent mais rarement visible. Comment concilier maternité et ambition professionnelle sans sacrifier l’une à l’autre ? La candidate s’est retrouvée au milieu du gué, partagée entre la joie immense de la naissance et la frustration d’un rendez-vous académique manqué.
Elle n’était pas en quête de traitement de faveur, simplement d’une égalité des chances réelle. Là où le calendrier devient un obstacle, l’institution peut-elle encore garantir la justice et la crédibilité du diplôme ? La question posée par son cas est concrète, et touche bien des étudiants, des parents et des enseignants.
Un message inattendu qui change tout
Deux jours après l’accouchement, la porte de sa chambre s’ouvre. Ce n’est pas seulement un soignant qui entre, mais le chef du service de gynécologie. Laura Laganga Senzio s’attend à des nouvelles médicales. Elle entend en réalité tout autre chose : la perspective de pouvoir passer l’examen malgré les circonstances.
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La candidate fond en larmes. Le soulagement et l’incrédulité se mêlent. « Je n’arrivais pas à le croire », confie-t-elle. À cet instant, rien n’est encore gagné. Mais l’idée que l’université envisage une solution fait déjà chavirer l’histoire de ce concours.
La logistique sous pression
Organiser une épreuve universitaire hors d’un amphithéâtre, c’est jongler avec des contraintes. Il faut des examinateurs disponibles, des documents officiels, une salle adéquate et des garanties pour l’équité entre candidats. Le tout dans des délais extrêmement serrés, sans perdre la rigueur académique.
Ce type d’adaptation suppose un cadre clair : procédure, commission compétente, modalités de contrôle. On ne parle pas d’un aménagement de confort, mais d’un dispositif strict permettant de préserver le niveau d’exigence et la transparence de l’évaluation.
Une vision concrète de l’égalité
Dans cette histoire, l’égalité des genres n’est pas un slogan. C’est une pratique. Le chef du service de gynécologie, Nino Rapisarda, résume l’enjeu avec émotion : refuser l’examen aurait été injuste. Derrière la phrase, il y a la conviction que la maternité ne doit pas devenir un handicap académique, encore moins une barrière invisible au projet professionnel.
Appliquer ce principe exige de la coordination. Il faut des décideurs qui prennent leurs responsabilités et des équipes prêtes à se déplacer. C’est un test grandeur nature de ce que signifie « donner les mêmes chances à chacun » dans le supérieur.
Une université à la manœuvre
Prévenue de l’absence forcée de la candidate, l’Université Kore d’Enna n’a pas laissé le dossier en suspens. Elle a travaillé à une solution formelle et rapide, capable d’assurer une épreuve conforme aux standards. En toile de fond, une idée simple : l’excellence académique ne se mesure pas seulement à ce qui est exigé des étudiants, mais aussi à la capacité d’une institution à les évaluer équitablement, y compris quand la vie bouscule l’agenda.
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Dans l’attente, Laura reste concentrée. Elle revoit mentalement ses notions, comme on répète un exposé avant de franchir la porte d’une soutenance. L’oral n’est pas un entretien improvisé, mais une évaluation structurée, où chaque question compte.
Une candidate, un bébé, et l’importance du cadre
À la maternité, le quotidien suit son cours entre soins au nouveau-né et visites. La jeune maman s’accorde de courts temps de récupération, l’esprit déjà tourné vers ses objectifs. La présence de Raffaele n’est pas un détail. Elle lui rappelle la raison pour laquelle elle tient à ce métier : transmettre, expliquer, guider. Tout ce qui fait sens dans la pédagogie.
Cette force tranquille, mêlée d’émotion, donne à son parcours un relief particulier. Rien de spectaculaire, mais une persévérance sans posture. L’ambition n’est pas incompatible avec la douceur d’un berceau.
Des visages, des dossiers, des questions
Vient alors le temps des questions et des réponses, celui de la confrontation aux critères du concours. Les enseignants examinateurs ont leurs dossiers, leurs mallettes, leur grille de lecture. La candidate, elle, a sa compétence, sa logique, ses exemples concrets puisés dans l’enseignement secondaire.
Un oral, c’est une rencontre intellectuelle. On apprécie la clarté, la précision, l’aptitude à problématiser, la capacité à proposer des situations pédagogiques. Et surtout, l’aisance à faire dialoguer théorie et terrain, ce qui distingue l’enseignant qui maîtrise sa discipline de celui qui la fait vivre.
Ce que cette histoire dit de l’institution
Au-delà du destin d’une personne, l’épisode interroge le service public de l’éducation et l’université. La crédibilité d’un concours d’entrée ne s’effondre pas parce qu’on aménage un cadre de passation ; elle se renforce lorsqu’on démontre qu’exigence et humanité peuvent coexister.
C’est aussi un signal envoyé à toutes celles et ceux qui cumulent responsabilités familiales et projets d’études. Le mérite n’est pas une ligne droite. Il s’éprouve parfois dans le détour, à condition que l’institution trace un passage sécurisé.
La scène finale qui a tout changé
Le 29 août, tout s’est concrétisé. Laura Laganga Senzio s’est installée dans le bureau du médecin-chef de la gynécologie à l’hôpital San Marco. Les professeurs de l’Université Kore d’Enna (UKE) se sont déplacés avec leurs dossiers pour lui faire passer l’épreuve orale sur place, à Catane. Le recteur de l’UKE, Paolo Scollo, avait pris un décret spécial, autorisant une sous-commission à organiser l’examen directement à la maternité, une organisation réalisée en moins de 24 heures. « Je n’arrivais pas à le croire », souffle la jeune maman, qui attend désormais les résultats. Croisons les doigts.