Une Tesla Model Y parcourt 25 km sans conducteur pour rejoindre son propriétaire
Depuis la création du pilotage automatique en 2014, Tesla a constamment amélioré ses fonctions de conduite semi-autonome. L’ambition de proposer un véhicule capable de se déplacer seul reste l’un des piliers de la stratégie de la marque. Les démonstrations passées, dont un trajet entre San Francisco et Los Angeles mené en 2016, avaient déjà marqué les esprits.
Pourtant, l’accès à ces technologies restait réservé à des clients avertis ou à des zones de test limitées. Avec cette opération, Tesla passe un cap symbolique en offrant une expérience de Full self‑driving sans intervention humaine, de l’usine jusqu’au seuil de la porte du client.
Des débuts mouvementés pour le Robotaxi
Le lancement officiel du service Robotaxi le 23 juin 2025 à Austin a suscité autant d’enthousiasme que d’inquiétude. Les véhicules, tous des Model Y, opéraient en piste fermée avant d’être autorisés à transporter de vrais passagers. Très vite, plusieurs infractions ont été rapportées : excès de vitesse, non-respect des feux tricolores et même circulations en sens interdit.
La NHTSA a ouvert une enquête approfondie suite à ces incidents. L’agence américaine de sécurité routière peut exiger des rappels ou même suspendre l’autorisation de circulation. Ces premiers couacs ont mis en lumière les limites actuelles des algorithmes et la nécessité de renforcer la fiabilité du système.
Face à ces problèmes, Tesla AI a intensifié les tests en simulation et sur route ouverte. Les équipes multiplient les scénarios complexes, allant de la conduite de nuit sous la pluie à la gestion des chantiers routiers. L’apprentissage profond évolue ainsi sur des millions de kilomètres virtuels.
Vers une architecture logicielle et matérielle sur mesure
La clé du succès réside dans l’équilibre entre puissance de calcul et qualité des données. Tesla a développé ses puces IA maison, conçues pour analyser en temps réel les flux vidéo et lidar. Ces unités sont optimisées pour l’entraînement des réseaux de neurones, réduisant la latence à quelques millisecondes.
Chaque Model Y embarque deux systèmes sur puce distincts. Le premier se concentre sur la détection immédiate d’obstacles et l’évitement d’urgence. Le second anticipe les trajectoires à plus long terme, gérant la planification de l’itinéraire et la prise en compte des panneaux de signalisation.
À cela s’ajoute le supercalculateur Dojo, dédié à l’apprentissage à grande échelle. Avec plusieurs exaflops de puissance, ce cluster permet d’entraîner les modèles de conduite sur d’immenses ensembles de données récoltés par la flotte. L’amélioration continue est ainsi assurée par des mises à jour logicielles régulières.
Un cadre réglementaire en pleine évolution
Aux États‑Unis, les règles varient d’un État à l’autre. Le Texas a adopté une approche permissive, permettant des essais sous supervision à distance. Mais la NHTSA reste souveraine pour sanctionner tout comportement jugé dangereux, comme ce fut le cas pour certaines violations sur les Robotaxi.
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En Europe, le déploiement se heurte à des réglementations plus strictes. La directive sur la sécurité générale des véhicules impose des tests rigoureux avant toute homologation. Les autorisations nationales doivent également tenir compte des responsabilités légales en cas d’accident.
La France a récemment engagé des poursuites contre Tesla pour « pratiques commerciales trompeuses » liées à la promesse d’une conduite entièrement autonome. Le gouvernement souhaite encadrer plus fermement l’usage de ces technologies et protéger les consommateurs contre des communications jugées trop ambitieuses.
En Allemagne, un débat parlementaire a été lancé pour déterminer si les constructeurs doivent garantir une supervision humaine en permanence ou si une autonomie complète peut être autorisée sous certaines conditions. L’objectif est d’harmoniser le cadre législatif à l’échelle européenne.
Waymo et les géants de la tech en embuscade
Waymo, la filiale d’Alphabet, exploite déjà un service de robotaxi à Phoenix et San Francisco. La société mise sur des zones géographiques très étudiées, où les cartes haute définition et la densité des capteurs garantissent une meilleure répétabilité des scénarios de conduite.
Cruise, soutenue par General Motors, teste également des navettes autonomes à San Francisco. Son approche se concentre sur des véhicules plus compacts, dédiés aux trajets urbains courts. Le rapprochement avec les opérateurs de transports publics fait partie de sa stratégie pour faciliter son intégration.
Uber Advanced Technologies Group et d’autres start‑ups comme Nuro explorent des modèles alternatifs : livraison de colis autonomes ou services de navette à la demande. Tous cherchent à rattraper leur retard en nouant des partenariats ou en mobilisant leurs propres ressources de R&D.
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Des usages encore à inventer
La possibilité pour un véhicule de se déplacer sans passager ouvre la voie à des services inédits. Il pourrait récupérer son propriétaire au chantier, emmener les enfants à l’école ou acheminer des courses commandées en ligne. La gestion des flux logistiques en zone urbaine serait ainsi profondément transformée.
Tesla avait annoncé dès la Model 3 une fonction de « partage » entre particuliers. Le propriétaire pourrait définir des plages horaires pendant lesquelles son véhicule, via la flotte Robotaxi, servirait d’auto‑partage. L’idée reste pour l’instant en sommeil, mais le prototype de 25 km montre que la technologie est prête.
Sur le plan professionnel, des flottes partagées pourraient réduire considérablement les coûts de transport pour les entreprises. Hôtels, aéroports et centres commerciaux pourraient proposer des navettes autonomes, connectées directement aux applications de réservation des clients.
Les défis éthiques et sécuritaires
Outre la performance technique, la cybersécurité demeure un enjeu majeur. Les véhicules autonomes, connectés en permanence, constituent une cible potentielle pour des cyberattaques. La sécurisation des mises à jour over-the-air et la protection des données des utilisateurs sont au cœur des préoccupations.
Sur le plan éthique, la question de la responsabilité en cas d’accident n’est pas totalement tranchée. Qui est responsable : le propriétaire, le constructeur ou l’éditeur du logiciel ? Les législateurs doivent élaborer des cadres clairs pour éviter les flous juridiques.
Vers une adoption grand public
Le coût d’un système Full self-driving reste élevé, souvent supérieur à 10 000 € en option. Tesla espère faire baisser ce tarif avec l’augmentation des volumes et l’amélioration des performances. Les assurances devront également s’adapter, en proposant des primes ajustées selon le niveau d’autonomie.
La confiance des usagers passe par la transparence sur les limites des systèmes. Les démonstrations publiques, comme ce trajet sans conducteur, jouent un rôle pédagogique essentiel. Elles permettent de dissiper les craintes liées à la techno‑phobie et d’en montrer la fiabilité.
Un secret bien gardé jusqu’à la fin
Tesla a d’abord diffusé une vidéo accélérée pour en souligner la simplicité d’usage, puis la séquence intégrale à vitesse réelle. On y découvre la gestion fluide des intersections, l’adaptation aux limitations de vitesse et la prise en compte des obstacles imprévus.
Selon Elon Musk, l’opération, qui aurait dû avoir lieu le 29 juin, a été réalisée le 28 juin 2025. Ce jour‑là, un Tesla Model Y a quitté la Gigafactory d’Austin au Texas pour parcourir près de 25 km sans aucune intervention humaine. Il a rejoint le domicile de son nouvel acquéreur, clôturant ainsi une étape majeure pour la conduite autonome grand public.
