Coup de massue : Lecornu prêt à durcir la fiscalité sur l’assurance-vie et les livrets
La ligne est assumée par Sébastien Lecornu et portée politiquement par François Bayrou. Pour trouver des marges sans toucher aux taux de TVA ni à l’impôt sur le revenu, la piste prioritaire remet sur la table la taxation des revenus de l’épargne. Dans le viseur, l’assurance-vie et les livrets qui captent une part majeure du patrimoine financier des ménages.
Au cœur des discussions, une hausse à l’étude du Prélèvement forfaitaire unique. Le PFU s’applique aujourd’hui à un taux global de 30 pour cent, prélèvements sociaux inclus. L’exécutif teste l’hypothèse d’un relèvement, présenté comme un effort de « solidarité budgétaire » dans un contexte de comptes publics contraints. Pour l’État, c’est un levier rapide. Pour les ménages, c’est un choc de rendement.
Cette stratégie s’inscrit dans une équation délicate. D’un côté, une promesse de ne pas alourdir l’impôt sur les salaires. De l’autre, la tentation de solliciter des produits de placement très diffus, jugés moins visibles politiquement. Or l’assurance-vie, les livrets et l’épargne réglementée sont précisément la tirelire des classes moyennes et des retraités.
Ce que cela change concrètement pour votre épargne
Si le PFU montait d’un cran, le rendement net des contrats en euros serait mécaniquement amputé. Dans une période où l’inflation rogne déjà le pouvoir d’achat, chaque point prélevé de plus réduit la performance réelle. Les épargnants les plus exposés seraient ceux qui comptent sur des rachats réguliers pour compléter une pension ou financer des dépenses courantes.
L’assurance-vie a longtemps été le couteau suisse de la gestion patrimoniale. Fiscalité lisible, souplesse des rachats, transmission facilitée. Un tour de vis questionnerait cette promesse d’équilibre. Les contrats multisupports garderaient leur intérêt de long terme, mais l’arbitrage entre unités de compte et fonds en euros serait revu avec un critère devenu central : la résilience réglementaire.
Et le livret A dans tout ça. Officiellement, son taux et son cadre relèvent d’une décision politique distincte. Mais les épargnants s’interrogent déjà. Lorsque l’ambiance est à la hausse des prélèvements sur l’épargne, la rumeur s’invite. D’où une nervosité croissante dès qu’un projet évoque « l’élargissement de l’assiette » ou la « simplification des prélèvements ».
Une brique « verte » qui renchérit les billets d’avion
La réforme ne se cantonne pas aux produits d’épargne. L’exécutif prépare aussi un volet écologique avec un renforcement des taxes sur les billets d’avion. Le message est clair : financer la transition par ceux qui émettent le plus, en particulier les trajets à forte empreinte carbone. Dans les faits, cela ferait grimper le coût des voyages, qu’ils soient personnels ou professionnels.
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Ce signal peut plaire à une partie de l’opinion, sensible à l’urgence climatique. Reste qu’il s’ajoute à une séquence de renchérissement général. L’inflation a tendu les budgets. Les entreprises gèrent des marges comprimées. Une taxe aérienne plus élevée se répercuterait sur les prix, les politiques de déplacement et, au final, sur le pouvoir d’achat.
Le risque d’un détour par le Luxembourg et la Belgique
Dès que la fiscalité s’alourdit, l’arbitrage s’invite. Les ménages les plus mobiles patrimonialement scrutent les alternatives européennes. Le Luxembourg arrive toujours en tête des conversations, suivi de la Belgique et d’autres places plus souples sur le plan fiscal. Même si le déménagement d’un contrat n’est jamais anodin, la simple possibilité d’un « ailleurs » suffit à entamer la confiance.
Cette perspective inquiète les acteurs de la place. Si une part de l’épargne française se déporte, c’est autant de financement en moins pour l’économie nationale. Les effets seraient progressifs, donc moins visibles dans l’immédiat. Mais l’addition, elle, serait bien réelle à moyen terme, pour les entreprises comme pour l’État.
La débancarisation silencieuse s’accélère
Autre effet de bord, plus diffus mais tenace : la montée d’une débancarisation partielle. À force de percevoir la banque comme un lieu de prélèvements plutôt que de protection, une frange de ménages choisit de diversifier loin des circuits traditionnels. Ce mouvement n’est pas massif, il est constant. Et il s’alimente à chaque annonce de hausse d’impôts sur l’épargne.
Dans ce climat, les actifs tangibles reprennent des couleurs. L’or et l’argent physiques séduisent par leur simplicité. Pas de promesse de rendement, mais une protection contre l’aléa réglementaire. L’or surtout bénéficie d’une image de valeur indifférente aux décisions politiques. Pour beaucoup, il devient une assurance contre l’inattendu fiscal.
Faut-il changer de stratégie tout de suite
La première règle est de ne pas agir sous l’effet de la peur. La seconde est d’évaluer sa situation avec des critères remis à jour. Désormais, le couple rendement net et stabilité réglementaire s’impose. Les placements liquides gardent leur utilité pour la trésorerie. Les comptes à terme offrent de la visibilité courte. L’assurance-vie conserve un intérêt pour qui vise la transmission et le long terme, à condition de connaître son horizon et sa tolérance au risque.
Ce qui change, c’est l’ordre des priorités. Les épargnants avertis introduisent une poche de diversification qui ne dépend pas d’un texte de loi. Pour certains, une exposition mesurée à l’or s’envisage comme un filet de sécurité, pas comme un pari. Pour d’autres, c’est la répartition entre fonds en euros et unités de compte qui évolue. Dans tous les cas, la boussole n’est pas le bruit, c’est l’objectif patrimonial.
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Le coût caché d’un point de fiscalité
Un point de PFU en plus n’est pas qu’une ligne sur un simulateur. Sur dix ans, il modifie la capitalisation. Il pèse sur la retraite complémentaire d’un ménage qui retire chaque année un montant fixe. Il décale la durée d’un projet immobilier pour un couple qui épargne l’apport. Mais fragilise également la trésorerie d’un indépendant qui utilise son contrat comme coussin de sécurité.
À l’échelle macro, ce point de fiscalité change aussi la psychologie de l’investisseur particulier. Moins de visibilité entraîne plus de prudence. Or la prudence, en finance personnelle, se traduit par des arbitrages défensifs. Un contrat que l’on garde. Un rachat que l’on reporte. Un projet que l’on ralentit. Lentement mais sûrement, c’est l’investissement qui se tasse.
Une réforme vendue comme « juste » mais socialement abrasive
La communication gouvernementale devrait insister sur la justice de l’effort demandé. L’argument est connu. Ceux qui ont du capital participeront davantage. Sauf que la sociologie de l’assurance-vie et des livrets ne se limite pas aux 1 pour cent des plus riches. Elle concerne des millions de classes moyennes, de cadres, d’ouvriers qualifiés, de retraités qui ont accumulé prudemment.
C’est tout l’enjeu politique. Comment revendiquer une réforme « indolore » quand elle touche des produits perçus comme des basics de la prudence financière. Le débat public, lui, ne manquera pas d’opposer « capital et travail ». Mais sur le terrain, les épargnants veulent surtout savoir si leur pouvoir d’achat et leurs projets seront épargnés.
Billets d’avion plus chers, signal climatique plus lisible
Revenons au volet aérien. Une taxe verte plus élevée a un mérite politique : elle adresse la question du carbone et finance des infrastructures durables. Mais elle ne vit pas dans un vide. Elle s’ajoute à un contexte de tarifs aériens déjà remontés. Pour une PME, un budget déplacements plus lourd pèse sur les marges. Pour une famille, il pèse sur les vacances.
Cet empilement nourrit un sentiment d’usure économique. Et quand l’usure s’installe, l’épargne se replie. Elle cherche des refuges simples. Elle devient moins productive à court terme, parce que la priorité n’est plus le rendement, mais la sécurité.
Comment garder l’initiative
L’outil clé reste la planification. Clarifier ses objectifs à 12 mois, 3 ans et 10 ans. Identifier ce qui relève du liquide, de l’assurantiel et du patrimonial. Réserver une part à la diversification indépendante des banques classiques. Et surtout, éviter les virages brutaux. Une allocation qui évolue par paliers absorbe mieux un changement de règles.
Enfin, se méfier des « recettes miracles ». La bonne décision est rarement universelle. Elle dépend de l’âge, de la situation familiale, de la capacité d’épargne et de la stabilité des revenus. Ce que la séquence actuelle exige, c’est une lecture lucide : les règles sont en mouvement. Il faut des portefeuilles capables de bouger sans tout casser.
À retenir, sans ambiguïté
Au terme des arbitrages en cours au sommet de l’État, la piste qui s’impose est limpide. Le gouvernement de Sébastien Lecornu, avec l’appui de François Bayrou, prépare un durcissement de la fiscalité de l’épargne, et la pièce centrale du dispositif à l’étude est bien un relèvement du PFU, qui placerait directement l’assurance-vie et certains livrets au cœur du tour de vis à venir.
- 28/09/2025 à 20:11il y a plus que marre de vouloir taper sur les livrets d'épargne qui sont le reflet de l'immense majorité des retraités qui ont parfois oeuvré 40 ans ou plus ,ce n'est certainement pas ce genre de mesures injustes qui feront apaiser le climat social et en agissant de la sorte,M lecornu ne pourra échapper aux foudres de la majorité des membres de l'Assemblée nationale: et la motion de censure dans ce cas là est inévitable et M Lecornu sera lui aussi contraint de démissionner;quant au 49 3 s'il est décidé,il faudra presque craindre un mouvement quasi insurrectionnel
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