Dany Boon escroqué de 4,5 millions d’euros : l’accusé promet de le rembourser
Depuis juillet 2025, le tribunal correctionnel de Nice étudie une affaire d’escroquerie impliquant l’acteur et réalisateur Dany Boon. Réputé pour son succès avec Bienvenue chez les Ch’tis, l’humoriste se retrouve confronté à un préjudice financier estimé à 4,5 millions d’euros. Cet article revient sur les faits, le déroulement de l’enquête et les enjeux de ce dossier exceptionnel.

L’avocat de Dany Boon a déposé la plainte après avoir découvert un montage financier fictif. Selon l’accusation, le prévenu a détourné les sommes destinées à des placements défiscalisés. L’enquête, ouverte pour blanchiment et fraude, met en lumière la vulnérabilité même des personnalités publiques face aux montages financiers complexes.
Le contexte financier et juridique
En droit français, l’escroquerie se définit par l’usage de manœuvres frauduleuses pour soutirer des fonds. Dans ce cas précis, la présentation d’une fausse identité et la création d’une société-écran sont au cœur de l’accusation. Les investigations s’appuient sur les articles du Code pénal relatifs à l’abus de confiance et au blanchiment de capitaux.
L’instruction a également mobilisé les services spécialisés dans les enquêtes financières. Les gendarmes de la section de recherche de Nice ont travaillé en collaboration avec Tracfin pour retracer le circuit des fonds. Le bureau central national antiblanchiment s’est penché sur des comptes à l’étranger, principalement au Panama et en Corée du Sud.
L’achat et la gestion d’un yacht
Tout débute en 2021 lorsque Dany Boon acquiert un yacht de grand luxe. Souhaitant optimiser la gestion de ce nouveau bien, il reçoit la recommandation d’un courtier se faisant appeler Terry Birles. Ce dernier gagne rapidement la confiance de l’acteur en proposant un service clé en main pour l’entretien, la logistique et les formalités administratives.
Le montant de l’acquisition atteint plusieurs millions d’euros, un investissement conséquent pour l’humoriste. Séduit par la promesse d’une gestion sans souci, Dany Boon confie intégralement le suivi du yacht à ce conseiller autoproclamé « héritier irlandais ». L’idée est de laisser un expert gérer les aléas techniques et fiscaux associés à un tel navire.
Peu à peu, Terry Birles met en avant la possibilité d’investir les excédents de trésorerie dans des produits à rendement attractif. Sous couvert de conseils avisés, il propose des placements défiscalisés à la Banque centrale irlandaise avec un taux annoncé de 3,25 % net d’impôts. L’offre paraît alléchante pour un particulier souhaitant faire fructifier son capital.
L’intermédiaire sous fausse identité
Derrière le nom de Terry Birles se cache en réalité Thierry B., 36 ans, diplômé de l’université d’Oxford. Célibataire et sans antécédent judiciaire reconnu, il soigne son apparence et affiche un parcours académique prestigieux pour asseoir sa crédibilité. Ces détails séduisent l’acteur, qui ne remet pas en cause l’authenticité de ce profil flatteur.
L’accusation révèle que Thierry B. utilise un faux passeport irlandais pour appuyer son imposture. Il prétend provenir d’une famille aristocratique détentrice de valeurs et d’un réseau international. Cette fausse légitimité joue un rôle essentiel dans la confiance accordée par Dany Boon, qui se fie alors aux recommandations de son « conseiller ».
À lire aussi
Les échanges entre l’accusé et l’acteur se déroulent par visioconférence et courrier électronique. Aucun des documents fournis ne soulève de suspicion immédiate. L’emploi d’un anglais soigné et de termes techniques renforce l’impression d’un interlocuteur spécialiste des placements internationaux.
Le montage de la société‑écran
Afin de rassurer la victime, Thierry B. crée la South Sea Merchant’s Mariners Ltd Partnership (SSMM), supposée être une entreprise familiale irlandaise. Cette structure ne possède aucune activité réelle et n’apparaît pas dans les registres officiels. Elle sert uniquement de façade pour faire transiter les fonds.
Thierry B. transfère les sommes versées par Dany Boon sur un compte bancaire britannique, puis redirige ces fonds vers des entités offshore. Les enquêteurs ne détectent aucune trace d’un projet concret ni de contrepartie tangible. Les factures émises par la SSMM restent factices et les audits internes se révèlent inexistants.
Aux yeux de la justice, ce montage caractérise l’absence totale de contrepartie financière. La société-écran ne sert qu’à masquer l’origine et la destination des capitaux. Les enquêteurs concluent rapidement à un stratagème visant à détourner les 4,5 millions d’euros investis par la star.
Crédit : Alain Flandrin / GFDL & CC BY‑SA 3.0
Les flux financiers offshore
Les fonds transitent d’abord vers un compte au Panama, un paradis fiscal connu pour son manque de transparence. Ils sont ensuite répartis entre plusieurs comptes en Corée du Sud, souvent utilisés pour compliquer davantage la traçabilité. Ces destinations permettent aux escrocs de multiplier les intermédiaires et de retarder les investigations.
Les autorités financières panaméennes coopèrent avec les enquêteurs français dans le cadre d’une demande d’entraide judiciaire. Les relevés bancaires et l’origine des transferts sont finalement obtenus, confirmant l’absence de toute opération légitime. Ces informations constituent la pièce maîtresse du dossier d’instruction.
En parallèle, les services de contrôle sud-coréens fournissent des éléments sur les comptes suspects. Ils mettent en évidence des mouvements rapides et sans justification économique. Les enquêteurs en France peuvent ainsi reconstituer le parcours des fonds sur cette chaîne complexe de transferts internationaux.
Un expert en finance internationale auditionné par la justice décrit ce schéma comme une technique classique de blanchiment. L’emploi de sociétés-écrans et de comptes offshore vise à embrouiller les pistes et à gagner du temps. L’objectif étant de diluer toute responsabilité et de rendre la preuve quasi impossible à établir rapidement.
L’enquête et la découverte de la supercherie
À lire aussi
L’enquête débute après un signalement de Dany Boon, qui s’inquiète de ne jamais recevoir de documents officiels de gestion. Alerté par un tiers se présentant comme autre victime, il réalise qu’il est victime d’une escroquerie. Son avocat saisit alors le juge d’instruction, demandant le gel des avoirs de l’accusé.
Les perquisitions au domicile de Thierry B. permettent de retrouver des ordinateurs contenant des échanges compromettants. Des copies de faux documents bancaires sont découvertes, ainsi que des contrats d’investissement inexistants. Ces éléments renforcent l’accusation d’escroquerie et de blanchiment de capitaux.
L’arrestation et l’extradition
En début d’année 2024, Thierry B. est localisé au Panama où il vivait sous une fausse identité. Il est interpellé le 13 février 2024 par la police locale puis placé en détention pour suspicion de fraude internationale. Les autorités françaises déposent aussitôt une demande d’extradition.
Après six mois de procédure, le système judiciaire panaméen accepte de remettre le prévenu à la France. Le 13 août 2024, il atterrit à l’aéroport de Nice sous haute surveillance. Son extradition marque une avancée décisive dans l’instruction et permet de sécuriser la garde à vue en France.
Crédit : 1959jph / CC BY‑SA 3.0
Le déroulement de la détention provisoire
Depuis son retour en France, Thierry B. est incarcéré à la maison d’arrêt de Nice. Placé en détention provisoire, il fait l’objet d’une surveillance stricte. Ses demandes de liberté sous caution sont systématiquement rejetées en raison de la gravité des faits et du risque de fuite.
Les juges considèrent que l’ampleur du préjudice – un détournement de 4,5 millions d’euros – justifie une détention prolongée. Cette mesure vise également à préserver les preuves et à éviter toute pression sur les témoins. L’audience se tiendra en septembre 2025, soit plus d’un an et demi après l’ouverture de l’enquête.
Les conséquences pour Dany Boon
Pour Dany Boon, cette affaire porte autant sur la dimension financière que sur le choc psychologique subi. Au-delà de la perte d’un montant conséquent, l’acteur éprouve un sentiment de trahison. Il témoigne auprès de la presse de sa volonté de voir la justice rétablir ses droits et obtenir réparation.
Ses avocats ont obtenu le gel de plusieurs biens de l’accusé, including a property purchased with the misappropriated funds. Ces mesures conservatoires garantissent que des actifs restent disponibles pour indemniser la victime en cas de condamnation.
Crédit : Shutterbug75 / Pixabay
Les enjeux pour l’industrie du yachting et les célébrités
Cette affaire soulève des questions sur la sécurité des investissements réalisés par des personnalités publiques. Le marché du yacht de luxe attire à la fois des professionnels compétents et des escrocs habiles. Les célébrités, moins aguerries aux montages financiers complexes, représentent une cible de choix pour ce type de fraude.
Les acteurs du secteur appellent à une meilleure vérification des interlocuteurs et des structures proposées. Des garanties supplémentaires pourraient être imposées, comme la vérification systématique de l’existence juridique des sociétés et l’audit indépendant des comptes. L’objectif est de renforcer la confiance tout en limitant les risques de sociétés-écrans fictives.
L’attente du procès
Le procès se tiendra en septembre 2025 devant le tribunal correctionnel de Nice. Les débats devraient durer plusieurs jours, tant le dossier comporte de pièces financières et d’auditions d’experts. Les juges devront déterminer si le montage constitue une escroquerie aggravée, et fixer la peine adéquate en fonction du préjudice et de la dangerosité de l’accusé.
D’ici là, l’instruction pourrait encore être complétée par de nouvelles expertises. Les avocats de la défense envisagent de contester certaines qualifications pénales, en particulier celle de blanchiment. Les plaidoiries souligneront l’absence de liens directs entre Thierry B. et les destinations finales des fonds détournés.
C’est dans cette ambiance tendue que Thierry B. a surpris l’audience en annonçant son souhait de faire amende honorable. Il a déclaré vouloir travailler dès sa sortie pour commencer à indemniser Dany Boon, malgré l’écart considérable entre son futur salaire et le montant du préjudice. Cette promesse inattendue pimente un dossier déjà riche en rebondissements.