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Pourquoi y a-t-il du carrelage blanc dans les stations de métro Parisiennes ?

Publié par Killian Ravon le 31 Oct 2025 à 15:30

Dans les couloirs du métro, ces murs recouverts de carreaux blancs biseautés ne sont pas qu’un caprice décoratif. Ils répondent à une logique très ancienne : mieux orienter, mieux éclairer et mieux rassurer des voyageurs plongés sous terre.

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Couloir du métro parisien vide, murs en carrelage blanc biseauté avec frise verte et brune, deux sièges orange, éclairage néon.
Dans les couloirs, le carrelage blanc reflète la lumière et guide l’œil : l’ADN visuel des stations parisiennes.

Et si les fameuses frises en céramique ont changé de style au fil des décennies, leur rôle, lui, est resté étonnamment constant.

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Aux origines d’une peau blanche pour les tunnels

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Dès 1900, au moment où Paris découvre son réseau souterrain, la question est simple : comment rendre fréquentables des espaces clos, sombres et humides ? La réponse tient en un matériau facile à poser et à nettoyer : la faïence blanche, dont la surface brillante renvoie la lumière et agrandit visuellement les volumes. Dans des stations encore faiblement éclairées, cette finition agit comme un véritable amplificateur lumineux. Son aspect régulier, lisse et hygiénique rassure aussi des voyageurs qui découvrent pour la première fois les entrailles de la ville. C’est ce « carrelage métro » rectangulaire et biseauté qui deviendra la signature du réseau, à la fois pratique et immédiatement reconnaissable.

Les premiers chantiers mobilisent des fabricants spécialisés de la région parisienne. Au-delà de la cadence industrielle, l’enjeu est déjà esthétique : un blanc soutenu, une brillance stable, des joints serrés. Le résultat donne à voir une trame ordonnée qui dissimule les aspérités des parois et valorise l’éclairage artificiel. Cette matérialité réfléchissante devient un outil au service du confort visuel et de la sécurité perçue.

Vue horizontale d’un couloir de Châtelet avec longs murs en faïence blanche brillante et encadrements carrelés, éclairage fluorescent continu.
La faïence blanche, le « fond de scène » lumineux des grands pôles de correspondance.
Crédit : © Wikimedia Commons – Mbzt (CC BY-SA 4.0)
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Quand les frises guident l’œil du trottoir jusqu’au quai

Souvent prises pour de simples ornements, les frises du métro forment dès l’origine un véritable langage visuel. Elles apparaissent dès 1900 pour tracer un fil conducteur entre l’entrée de la station, les couloirs et les quais, accompagnant le regard comme une ligne d’horizon à hauteur d’œil. Ce code est d’autant plus utile que les circulations sont labyrinthiques : la frise aide à « tenir le cap », à comprendre intuitivement le chemin de la sortie, et à repérer des informations utiles sans multiplier les panneaux.

Au-delà de leur fonction pratique, ces bandeaux décoratifs fixent l’identité des stations. La répétition graphique sur des dizaines de mètres crée une mémoire visuelle : en un coup d’œil, l’usager reconnaît « sa » station, même avant de lire l’enseigne murale. Cette dimension sensible, discrète mais efficace, a fortement contribué à l’attachement des Parisiens à leur métro.

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Gros plan horizontal des carreaux à motifs Nord-Sud avec encadrement brun et lettrage, typique des stations historiques.
Héritage Nord-Sud : quand l’ornement sert aussi à guider.
Crédit : © Clicsouris / Wikimedia (CC BY-SA 3.0)

Nord-Sud vs CMP : deux esthétiques, une même idée

Au début du XXᵉ siècle, deux compagnies se partagent l’exploitation : la CMP d’un côté, la Compagnie Nord-Sud de l’autre. Cette dernière impose dès 1902 une grammaire décorative très travaillée : céramiques colorées, monogrammes, motifs de feuilles de chêne, frises ondulées. Les couleurs y ont un sens : brun miel pour les stations simples, vert pour les correspondances et les terminus. La CMP, d’abord plus sobre, adoptera à son tour des décors floraux et géométriques dans les années 1920. Deux écoles, donc, mais un même objectif : structurer la lecture de l’espace, rendre chaque étape du trajet lisible et, au fond, rendre l’expérience voyageur plus fluide.

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Ce jeu d’identités n’empêche pas la continuité : la faïence blanche reste le fond de scène commun, comme une page neutre sur laquelle viennent s’inscrire noms de stations, encadrements publicitaires et frises. Le décor n’est pas une « coquille », c’est un système d’orientation.

Des modes… aux retours aux sources

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Comme tous les intérieurs publics, les stations ont connu des cycles esthétiques. Après l’âge d’or de la faïence, certaines modernisations d’après-guerre testent des habillages métalliques puis des carrelages orangés dans les années 1960-1970, jugés alors plus « dynamiques ». Pourtant, le blanc revient rapidement au premier plan : dans les années 1970-1980, la tendance dite Andreu-Motte réintroduit les carreaux biseautés en conservant la base claire et en injectant la couleur par touches maîtrisées, via des rampes lumineuses colorées et des assises coordonnées. La station devient à la fois lisible, lumineuse et mémorisable.

Ce mouvement de retour à l’ADN va s’accentuer à partir de 1998 avec le grand programme de modernisation du réseau : un « métro plus beau » qui renoue avec les qualités originelles du matériau tout en modernisant l’éclairage, la ventilation et l’accessibilité. Partout, le blanc brillant reprend sa place, parce qu’il coche toutes les cases d’un espace public souterrain : clarté, propreté perçue, sobriété, facilité d’entretien.

Détail horizontal d’une frise en céramique style Nord-Sud montrant vagues et encadrements, teintes brunes et vertes.
Les frises historiques, un code couleur avant l’heure.
Crédit : © Gonioul / Wikimedia (CC BY-SA 3.0)
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Pourquoi le blanc fonctionne toujours (et mieux sous terre)

Sous la terre, la lumière naturelle n’existe pas. Le blanc biseauté, par sa capacité à diffuser le flux lumineux, maximise le rendement de chaque source, réduit les zones d’ombre et participe au sentiment de sécurité. Le biseau, lui, casse la monotonie d’un plan plat : il capte des reflets, crée un micro-relief, anime visuellement les parois sans surcharger l’espace. Le nettoyage est rapide, les pièces se remplacent facilement, et l’ensemble résiste bien au temps. Dans un environnement à très forte fréquentation, cette addition de qualités pratiques finit par dessiner une esthétique : celle d’un blanc utilitaire devenu emblème.

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Autre avantage : sur fond clair, la signalétique ressort mieux. Le nom des stations, l’iconographie des lignes, les annonces travaux ou informations voyageurs gagnent en lisibilité. Le blanc agit comme un fond de scène neutre pour tous les usages du réseau, qu’il s’agisse d’affichages culturels, de campagnes de prévention ou de la publicité.

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Les frises, ce GPS graphique qui ne dit pas son nom

Dans un couloir, une frise fonctionne comme un filet d’Ariane. Elle relie l’entrée aux quais, et le quai à la sortie, en donnant à l’œil un repère continu. Quand la station est simple, la frise adopte traditionnellement une teinte brun miel, quand il y a correspondance ou terminus, elle passe au vert. Ce code — décliné et réinterprété selon les époques — est resté intelligible même pour ceux qui ne le connaissent pas formellement : une couleur qui court sur le mur invite naturellement à la suivre.

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Certaines stations ont poussé plus loin le vocabulaire décoratif : encadrements publicitaires cernés de motifs, cartouches de station surdimensionnés, monogrammes stylisés. Autant de variations qui entretiennent un patrimoine graphique admiré des passionnés et redécouvert par de nouvelles générations d’usagers.

Couloir carrelé aux murs blancs et encadrements céramique, vue horizontale nette des joints et reflets lumineux.
La brillance qui capte la lumière et élargit visuellement les volumes.
Crédit : © Mbzt / Wikimedia (CC BY-SA 4.0)

Le renouveau contemporain : moderniser sans gommer l’icône

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Depuis la fin des années 1990, les rénovations cherchent le bon équilibre entre confort moderne et héritage. Le carrelage blanc reste l’invariant, mais il s’accompagne d’éclairages plus performants, de revêtements plus résistants et d’interventions artistiques ponctuelles. Certaines lignes récentes, comme les prolongements contemporains, jouent avec des motifs en faïence plus subtils, des rosaces ou des trames visuelles qui animent de grands volumes tout en conservant l’esprit du lieu. Résultat : on circule dans des espaces plus clairs, plus lisibles et pourtant toujours typiquement parisiens.

Au fond, c’est la même logique qu’en 1900 : guider, éclairer, rassurer. Simplement, les outils ont évolué. Le blanc biseauté demeure, comme une base intemporelle sur laquelle Paris continue d’écrire son histoire souterraine.

Ce détail que peu de gens connaissent…

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Derrière la beauté sage de ces carreaux se cache une astuce d’ingénieur : le biseau n’est pas qu’un effet « vintage ». Il attire la lumière vers l’œil, gomme les petites irrégularités des murs voûtés et rend l’entretien plus efficace en évitant que l’eau ne stagne sur les arêtes. Un choix de design utilitaire devenu, avec le temps, une esthétique à part entière.

Panneau horizontal montrant un motif de rosace en petits modules de carrelage blancs et anthracite, style contemporain.
Aujourd’hui, la faïence dialogue avec des motifs contemporains sans renier l’ADN du réseau.
Crédit : © Wikimedia Commons (CC BY-SA 4.0)

Que retenir ?

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Si le carrelage blanc s’est imposé, c’est d’abord parce qu’il fait mieux voir et mieux se repérer. Les frises, elles, n’ont jamais cessé d’être un GPS graphique discret. Autrement dit, l’icône du métro parisien n’est pas née d’un caprice décoratif : elle découle d’une décision d’éclairage et d’orientation prise dès 1900… et toujours payante aujourd’hui.

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1 commentaire

  • R
    Ratinox
    10/11/2025 à 12:02
    Bien l'article, merci.

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