Icône menu hamburger Icône loupe de recherche
  1. TDN >
  2. Santé

Apnée du sommeil : une nouvelle étude pointe un lien concret avec Alzheimer via de minuscules saignements cérébraux

Publié par Killian Ravon le 06 Nov 2025 à 7:02

De nouvelles données publiées fin octobre 2025 relancent le débat : l’apnée du sommeil ne se limiterait pas aux ronflements et à la fatigue. Elle serait associée à un risque accru de micro-hémorragies cérébrales, ces minuscules saignements souvent invisibles qui, avec le temps, sont liés au déclin cognitif et aux démences comme Alzheimer. De quoi prendre ce trouble de nuit bien plus au sérieux, préviennent les chercheurs, surtout quand il est modéré à sévère.

La suite après cette publicité
Homme d’âge mûr dormant sur le côté avec masque CPAP, tuyau relié à l’appareil sur la table de nuit, éclairage doux et chaud.
Le masque CPAP stabilise la respiration pendant la nuit : le traitement de référence des apnées modérées à sévères.

L’étude, parue le 28 octobre 2025 dans JAMA Network Open, a suivi 1 441 adultes issus de la cohorte coréenne KoGES présentant un SAHOS (syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil) modéré à sévère.

La vidéo du jour à ne pas manquer

Après prise en compte de l’âge, du sexe, de l’IMC, de l’hypertension, du diabète et du cholestérol, le risque de micro-hémorragies cérébrales ressort nettement plus élevé que chez des témoins. Et c’est précisément ce marqueur cérébral discret qui alimente l’hypothèse d’un chemin vers Alzheimer.

La suite après cette publicité

Apnée du sommeil : ce qui se passe la nuit, minute par minute

Sous son sigle SAHOS, l’apnée obstructive du sommeil décrit des pauses respiratoires (apnées) et des réductions de débit (hypopnées) qui se répètent au moins cinq fois par heure, parfois des dizaines de fois. Chaque épisode dure autour de 10 à 30 secondes et fragmente le sommeil en provoquant des micro-réveils.

La suite après cette publicité

Dans le quotidien, cela se traduit par des ronflements, une somnolence diurne, des matinées lourdes et un sentiment de repos inachevé. Mais saviez-vous que ces coupures de respiration s’accompagnent aussi de variations d’oxygénation du sang, un stress que le cerveau n’aime pas du tout ?

Chez les sujets âgés ou en surpoids, ce tableau est plus fréquent. Pourtant, l’apnée reste longtemps banale à leurs yeux : on s’habitue aux siestes impérieuses, on banalise les réveils nocturnes. C’est précisément cette banalisation qui inquiète les spécialistes, car ces perturbations répétées imposent au système nerveux une succession de micro-chocs métaboliques. Le danger ne vient pas d’une nuit isolée, mais de l’accumulation au long cours.

Patient allongé équipé d’un masque CPAP, tuyau relié à l’appareil, illustrant le traitement de l’apnée obstructive du sommeil.
La CPAP, traitement de référence des apnées modérées à sévères.
Crédit : myUpchar / Wikimedia Commons (CC-BY).
La suite après cette publicité

Micro-hémorragies : de petites traces sur l’IRM, un grand signal d’alarme

Les micro-hémorragies cérébrales sont de minuscules dépôts de sang visibles à l’IRM. La plupart du temps, elles ne déclenchent aucun symptôme immédiat. Elles n’en sont pas moins importantes : chez les personnes âgées, leur nombre augmente avec l’âge et s’associe à un risque majoré d’AVC et de déclin cognitif.

C’est là que l’étude de JAMA Network Open interpelle : chez les 1 441 participants atteints d’apnée du sommeil modérée à sévère, ces micro-saignements sont plus fréquents que chez des personnes sans apnée, et l’écart persiste même après avoir neutralisé statistiquement l’âge, le sexe, l’IMC, la tension artérielle, le diabète et les lipides.

À lire aussi

La suite après cette publicité

En clair : les micro-coupures respiratoires de la nuit ne se contenteraient pas d’abréger le sommeil, elles laisseraient aussi des empreintes vasculaires dans le cerveau. Elles ne provoquent pas une démence à elles seules, mais elles installeraient un terrain moins favorable à la mémoire et à l’attention.

Pour des équipes comme celle du Dr Rudy Tanzi (Harvard, Mass General Hospital), ce signal justifie de « prendre cela plus au sérieux » : le dommage potentiel lié à l’apnée pourrait être « plus grave qu’on ne le pense ».

Sujet relié à des capteurs de polysomnographie en clinique du sommeil, capteurs EEG et thoraciques visibles sur le torse.
Enregistrement du sommeil : la preuve par les capteurs.
Crédit : Clinique Somnomed / Wikimedia Commons (CC-BY-SA).
La suite après cette publicité

Ce que l’étude a réellement montré, et ce qu’elle n’a pas dit

Dans ce travail mené en Corée, les chercheurs ont extrait de la cohorte KoGES des adultes présentant un SAHOS au moins modéré. Ils ont comparé l’apparition de micro-hémorragies cérébrales avec un groupe de référence, en ajustant sur les facteurs de confusion classiques : âge, sexe, IMC, hypertension, diabète et cholestérol.

Le sur-risque observé concerne l’apnée modérée à sévère, pas les formes légères. C’est un point essentiel : l’intensité du trouble du sommeil semble peser dans la balance cérébrale.

La suite après cette publicité

L’étude n’a pas tranché sur la causalité : l’apnée ne « cause » pas mécaniquement une micro-hémorragie, et a fortiori pas une maladie d’Alzheimer. Elle établit une association solide entre un trouble respiratoire nocturne sévère et un marqueur vasculaire cérébral, association cohérente avec ce que l’on sait déjà du lien entre apnée et maladies cardiovasculaires. La prudence s’impose donc : pas d’alarmisme, mais un message clair sur la gravité sous-estimée des SAHOS marqués.

Pourquoi ce lien avec Alzheimer fait sens du point de vue biologique

La suite après cette publicité

En apnée obstructive, les voies aériennes se referment et l’oxygène sanguin chute. Ces hypoxies intermittentes, répétées nuit après nuit, déclenchent des réponses inflammatoires et vasculaires. Sur le cerveau, elles se traduisent par un stress oxydatif, des atteintes de la paroi des petits vaisseaux et, au fil du temps, par des micro-hémorragies visibles en imagerie.

À lire aussi

Or les micro-lésions vasculaires sont connues pour favoriser un déclin cognitif plus rapide et, chez certains, accélérer le basculement vers une démence. C’est une route indirecte vers Alzheimer : pas une autoroute, mais un chemin qui se dessine avec la répétition des nuits fragilisées.

Cela rejoint un constat d’ensemble : l’apnée du sommeil est massivement répandue chez les adultes d’âge moyen, et sa prévalence grimpe avec l’obésité et l’âge. Beaucoup vivent des années avec un SAHOS non diagnostiqué, parce qu’ils ne se reconnaissent pas dans les symptômes « classiques » ou parce qu’ils confondent la fatigue avec un rythme de vie chargé. Or, plus l’exposition dure, plus le fardeau vasculaire s’accumule.

La suite après cette publicité
Patient de profil équipé pour un enregistrement du sommeil, électrodes et câbles connectés à l’unité de mesure au chevet.
Dormir sur le côté peut limiter certains événements obstructifs.
Crédit : Clinique Somnomed / Wikimedia Commons (CC-BY-SA).

Concrètement, qui est concerné et quand s’alarmer ?

Le portrait-robot reste celui d’un adulte en surpoids, souvent hypertendu, qui ronfle et peine à rester éveillé l’après-midi. Mais l’apnée touche aussi des personnes minces, notamment avec l’âge, et ne s’entend pas toujours : une apnée silencieuse existe.

La suite après cette publicité

S’alarmer, c’est d’abord prêter attention aux réveils nocturnes répétés, au bâillement permanent au volant, aux trous de mémoire qui s’installent. Ce détail que peu de gens connaissent : ce ne sont pas les huit heures au compteur qui comptent, mais la qualité d’un sommeil non fragmenté.

L’étude publiée fin octobre 2025 ne dit pas qu’une nuit difficile vous met sur la voie d’Alzheimer. Elle dit que, chez des personnes avec SAHOS modéré à sévère, le cerveau porte plus souvent la signature de minuscules saignements. Ce marqueur, discret mais redouté des neurologues, s’associe à un risque plus élevé d’AVC et de déclin cognitif.

D’où l’idée de ne pas attendre l’irréparable : quand l’entourage note des pauses respiratoires, quand les ronflements deviennent massifs, quand l’endormissement diurne gagne du terrain, le dépistage s’impose.

La suite après cette publicité
Coupe axiale IRM FLAIR du cerveau, montrant une lésion ischémique frontale avec hypersignal.
L’imagerie révèle des traces parfois invisibles au quotidien.
Crédit : Wikimedia Commons (CC-BY).

Et maintenant ? Le message de santé publique derrière la découverte

Que faire d’un résultat comme celui-ci ? D’abord, le prendre au sérieux. La bonne nouvelle, c’est qu’un dépistage simple existe : un enregistrement du sommeil à la maison ou une polysomnographie en laboratoire.

La suite après cette publicité

Ensuite, des traitements éprouvés réduisent les événements nocturnes : la pression positive continue (PPC/CPAP) fait ses preuves dans les formes modérées à sévères, tandis que les orthèses d’avancée mandibulaire ou l’hygiène de vie peuvent aider certaines situations. L’objectif n’est pas de « guérir » en une nuit, mais de réduire la fragmentation du sommeil et d’épargner au cerveau ces hypoxies répétées.

Un mot enfin sur la prévention : les facteurs de risque de l’apnée recoupent ceux des maladies vasculaires. Agir sur le poids, l’hypertension et la glycémie, c’est agir en même temps sur le risque cérébral. Ce n’est pas spectaculaire, mais c’est ce qui, à l’échelle d’une vie, fait toute la différence.

IRM axiale montrant un liseré d’hypo-intensité compatible avec dépôts d’hémosidérine après hémorragie intracrânienne.
Les micro-saignements, un marqueur discret mais révélateur.
Crédit : Wikimedia Commons (CC-BY).
La suite après cette publicité

Que retenir ?

Le point le plus frappant de l’étude est que le sur-risque de micro-hémorragies chez les personnes avec SAHOS modéré à sévère reste significatif même après ajustement sur l’âge, le sexe, l’IMC et l’hypertension : autrement dit, c’est bien l’intensité de l’apnée elle-même qui semble laisser une trace mesurable dans le cerveau.

Rejoignez nos 875 726 abonnés en recevant notre newsletter gratuite

N'oubliez pas de cliquer sur l'email de validation pour confirmer votre adresse email. Si vous ne l'avez pas recu vérifiez dans vos spams.

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *