Arnaque à la pompe : quand le pistolet mal raccroché vous fait payer plus
Les aires d’autoroute se muent chaque été en véritable zone à risques pour les automobilistes en quête de carburant. Avec l’afflux massif de véhicules, la circulation intense et l’attention parfois dispersée entre fatigue et impatience, les escrocs y voient l’occasion idéale pour sévir. Parmi les stratagèmes les plus sournois, l’arnaque à la pompe à essence connaît ces derniers mois un regain d’activité en France.
Dans ce contexte, la moindre inattention peut se transformer en mauvaise surprise au moment de consulter son relevé bancaire. Les victimes, dépitées, se retrouvent débitées de plusieurs dizaines. Voire centaines d’euros. Alors qu’elles n’ont jamais fait le plein… ou seulement partiellement. Retour sur ce piège peu connu qui, malgré sa simplicité, fait des ravages.
Des victimes prises dans un acte de confiance
La plupart des automobilistes ayant subi cette escroquerie ne se doutent de rien. Tout se passe dans ce qu’ils considèrent comme un moment anodin. Ils insèrent leur carte de crédit au paiement pour un montant modeste. Parfois à peine 20 ou 30 euros. Et récupèrent une petite somme en espèces en échange. L’illusion est totale : ils repartent sereinement, persuadés d’avoir réglé leur plein.
Cette première étape, qui repose sur la confiance et la rapidité de l’opération, permet à l’arnaqueur de gagner du temps. Il profite ensuite de l’absence de contrôle immédiat de la part du conducteur pour laisser le plein se poursuivre à son insu. Le tour est joué : lorsque l’automobiliste vérifie son compte quelques jours plus tard. Il découvre un débit excédentaire, souvent proche de 150 euros, somme correspondant à une autorisation maximale courante sur les pompes connectées.
Comment se met en place le piège
Victor Marteau, gérant d’une station-service Avia à Ardentes dans l’Indre, détaille le procédé face aux caméras : « Si vous regardez bien, le pistolet n’est pas entièrement raccroché, ce qui fait qu’il y a juste à le reprendre et à continuer son plein tranquillement jusqu’à l’autorisation donnée » . Sans s’en apercevoir, la victime reprend la poignée pour remplir son réservoir, sans ressentir la moindre gêne. Quelques minutes plus tard, le mal est fait. Le compteur de la pompe continue de tourner. Bien au-delà du montant initialement payé.
Selon M. Marteau, l’astuce est si bien rodée que la banderole de protection du pistolet, souvent présente pour assurer l’étanchéité, est volontairement déplacée. La légère inclinaison du pistolet suffit à contourner le système de détection de fin de transaction.
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Les indices qui doivent alerter
Plusieurs signaux peuvent mettre la puce à l’oreille des conducteurs : une légère inclinaison du pistolet, un petit cliquetis inhabituel au moment de raccrocher ou encore un écran de pompe qui n’indique pas « merci » de manière claire. Dans l’effervescence d’un départ en vacances, il est pourtant facile de passer à côté de ces détails.
Pour se prémunir, il convient de respecter quelques réflexes simples : prendre toujours quelques secondes pour vérifier que le pistolet est bien en place, jeter un œil au montant affiché avant de quitter les lieux et, si possible, conserver le ticket de paiement. En cas de doute, le geste le plus sûr reste de demander confirmation au personnel de la station ou de vérifier immédiatement son relevé de compte via l’application bancaire.
D’autres pièges sur la route des vacances
Loin d’être isolée, cette méthode s’inscrit dans un ensemble de pratiques frauduleuses repérées sur nos autoroutes. Parmi celles-ci : l’arnaque dite « à la péruvienne », où l’on propose une aide factice pour porter des bagages, l’arnaque à la dépanneuse, qui joue sur la peur de rester coincé, l’arnaque au pneu crevé, où un faux dépanneur propose un remplacement coûteux, ou encore l’arnaque au rétroviseur, où le miroir est volontairement abîmé pour obliger à un remplacement express.
Chacune de ces méthodes exploite un moment de vulnérabilité : fatigue, stress ou simple désir d’être aidé. Les escrocs rivalisent de ruse et de mise en scène pour convaincre leur cible de payer des services factices ou surfacturés.
Pourquoi rester vigilant tout au long du voyage
La vigilance ne doit pas s’arrêter à la pompe : elle doit accompagner chaque étape du voyage. Avant de prendre la route, il est conseillé de vérifier l’état du véhicule, de planifier ses arrêts et de conserver les coordonnées d’assistance officielles. Pendant le trajet, garder un œil sur les environs, éviter de stationner dans des zones isolées et privilégier les aires de repos bien éclairées peut limiter les risques.
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Au-delà des conseils classiques, l’essentiel reste la prudence face à toute sollicitation inattendue. Un proverbe, souvent cité mais jamais aussi vrai : « mieux vaut prévenir que guérir ». Sur l’autoroute comme ailleurs, la méfiance est la première arme contre la fraude.
L’appel à la responsabilité des gestionnaires de stations
Si les automobilistes ont un rôle actif à jouer, les exploitants de stations-service peuvent aussi contribuer à la prévention. Installer des affichages rappelant les bons réflexes, sensibiliser régulièrement le personnel aux techniques employées et effectuer des contrôles systématiques des pompes sont autant de mesures efficaces.
De plus, la modernisation des systèmes de paiement, avec des capteurs plus sensibles et des alertes en temps réel, pourrait dissuader les malfaiteurs. Plusieurs grandes enseignes étudient d’ailleurs des solutions de surveillance vidéo et de détection d’anomalies sur les pompes.
Un risque qui va croissant
Le nombre de plaintes recensées pour ce type d’arnaque a augmenté de façon significative ces derniers mois. Les forces de l’ordre tirent la sonnette d’alarme : les escrocs s’organisent souvent en petits groupes itinérants, se déplaçant de station en station pour éviter d’être repérés. Face à cette escalade, la coopération entre gérants, clients et autorités locales devient primordiale.
Les témoignages recueillis montrent que, lorsque la mésaventure est signalée rapidement, il est parfois possible de bloquer la transaction et d’obtenir un remboursement. Cela suppose toutefois une réaction immédiate de la victime, ce qui n’est pas toujours évident en plein voyage.
C’est bien cette simple maladresse du pistolet mal raccroché qui constitue le cœur du piège. En laissant volontairement la poignée à demi-accrochée, l’escroc détourne le système de coupure automatique de la pompe. Résultat : le carburant continue de se déverser jusqu’à atteindre la limite d’autorisation, souvent fixée à 150 euros. La victime, partie l’esprit léger, découvre alors avec stupeur un débit injustifié sur son compte bancaire.