« Un héros du quotidien » : ce célèbre chanteur des années 60 nous a quittés
Robert Cabot Sherman Jr. alias Bobby Sherman voit le jour en juillet 1943 dans une famille de la classe moyenne de Californie. Très tôt, il est attiré par la musique et le spectacle, passant la plupart de ses heures libres à fredonner des airs de rock’n’roll et à imiter ses idoles de l’époque. Son environnement familial, à la fois protecteur et encourageant, lui permet de recevoir ses premiers cours de chant et de guitare. Rapidement, son talent brut se dessine, et son entourage comprend qu’il pourrait bien tracer une carrière sous les projecteurs.
Adolescent, Bobby Sherman découvre la télévision, ce média naissant qui révolutionne la diffusion des arts et de la culture aux États-Unis. Il rêve alors de figurer un jour parmi ces visages familiers, qu’on retrouve chaque semaine dans le salon familial. Les séries et les variétés télévisées deviennent ses manuels d’apprentissage, et il note dans un carnet les techniques d’interprétation des comédiens et chanteurs qu’il admire.
Une première marche vers la célébrité
En 1968, à tout juste 25 ans, Bobby Sherman décroche un rôle dans la sitcom Here Comes the Brides (intitulée Cent filles à marier en France). Dans ce programme familial, il incarne un jeune bûcheron charmeur qui participe à un audacieux projet : escorter cent jeunes femmes vers l’Ouest sauvage pour repeupler la région. La série rencontre immédiatement le succès outre-Atlantique grâce à son ton léger et à la complicité entre les personnages. Pour Bobby, c’est la première exposition à grande échelle : son visage s’affiche chaque semaine sur les écrans des foyers américains.
La curiosité des producteurs musicaux ne tarde pas à se manifester. Conscients de l’engouement suscité par le comédien, ils lui proposent de poser sa voix sur des titres pop adaptés à son image d’éphèbe romantique. Ainsi naît sa carrière de chanteur, qu’il abordera avec la même détermination que son travail d’acteur.
Le triomphe des hit-parades
La transition de la comédie à la chanson se révèle un pari gagnant. En 1969, Bobby Sherman enregistre Little Woman, une ballade aux accents folk-pop portée par une ligne de basse entraînante et des chœurs aériens. Le titre s’arrache dans les stations radio et grimpe jusqu’à la 3ᵉ place du Billboard Hot 100, offrant à son interprète une visibilité internationale.
Fort de ce premier succès, Bobby enchaîne avec Easy Come, Easy Go, un morceau au tempo plus soutenu et aux paroles évoquant les hauts et les bas de l’amour adolescent. L’accueil est tout aussi enthousiaste : le single se hisse dans le top 10 américain, confirmant la popularité du jeune artiste. Suivent alors Julie, Do Ya Love Me et Jennifer, deux titres qui consolident sa réputation de Teen Idol et attirent des foules toujours plus nombreuses lors de ses concerts.
L’image étudiée d’un cœur tendre
Derrière l’image publique de jeune premier se cache un garçon réservé, soucieux de ménager sa vie privée. Les séances photo le montrent souvent souriant, vêtu de tenues soignées et entouré de jolies jeunes filles venues pour rencontrer leur idole. Les magazines destinés aux adolescents alimentent cette frénésie en publiant des reportages sur ses loisirs, sa garde-robe et ses nouvelles chansons. Bobby participe volontiers à ces interviews, conscient qu’un lien étroit avec ses fans est essentiel pour durer.
Au-delà de la musique, il se passionne pour le sport et la nature. À l’instar de nombreux jeunes de son époque, il pratique le skateboard, le surf et le vélo, préférant souvent les activités en plein air aux soirées trop mondaines. Cette simplicité contribue à renforcer son attrait : il apparaît comme le garçon de la porte d’à côté, accessible, sincère et proche de ceux qui le suivent.
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L’apogée de la gloire et la construction de l’héritage
Au début des années 70, Bobby Sherman est au sommet de sa carrière. Ses singles se vendent à des millions d’exemplaires, et il remplit facilement les salles de spectacle à travers les États-Unis. Les tournées s’enchaînent, de New York à Los Angeles, et même jusqu’à Tokyo, où il découvre une base de fans enthousiaste. Il figure en couverture des magazines Rolling Stone, Tiger Beat et TV Guide, et ses chansons résonnent dans les jukebox des cafétérias et des clubs de danse.
Pourtant, malgré cette effervescence, le chanteur ressent un certain malaise. L’industrie musicale, marquée par un rythme effréné et des pressions constantes, l’épuise peu à peu. Ses tournées, bien que lucratives, le laissent souvent fatigué et nostalgique de la vie tranquille qu’il a connue avant la célébrité. Il confie lors d’une rare interview qu’il aspire à « rendre quelque chose de concret » à la société. Au-delà du simple divertissement.
Le choix inattendu d’une reconversion
En 1978, alors que son dernier album peine à trouver son public. Bobby Sherman annonce sa décision de quitter le monde du show-business. Cette nouvelle stupéfie ses admirateurs, qui redoutent déjà de voir disparaître l’une des figures les plus brillantes de la pop. Toutefois, le chanteur demeure ferme : il souhaite se consacrer à autre chose, à un métier plus… essentiel.
Il passe alors plusieurs mois à se former auprès du service de secours de Los Angeles, le LAPD. Avant d’obtenir sa certification d’ambulancier. Aux yeux de beaucoup, cette reconversion est un acte de bravoure. Du glamour des studios à l’urgence des accidents de la route. Il n’y a qu’un pas que Bobby franchit sans hésiter.
Une vocation au service de la vie
Dès sa première année au sein des équipes de secours, il découvre l’émotion intense des interventions d’urgence. Les sirènes, les brancards, les visages inquiets des blessés : tout le sensibilise à la fragilité de l’existence. Rapidement, il gagne le respect de ses collègues, impressionnés par son sérieux et sa rapidité d’action.
Sa notoriété constitue un atout précieux : les chaînes locales lui consacrent des reportages où il apparaît en uniforme, casque visière relevée. Assistant les victimes avec une empathie rare. Mais Bobby refuse de capitaliser sur son passé de chanteur pour se mettre en avant. Pour lui, chaque vie sauvée compte davantage que n’importe quel disque d’or.
Un engagement familial et humanitaire
Parallèlement à son métier d’ambulancier, Bobby Sherman cultive une vie de famille discrète aux côtés de sa femme, Brigitte Poublon. Rencontrée peu avant sa retraite artistique. Le couple se marie en 1976 et connaîtra 29 années de complicité. Ensemble, ils fondent en 2011 la Brigitte and Bobby Sherman Children’s Foundation. Destinée à financer des programmes d’éducation et de musique pour les enfants défavorisés au Ghana.
Chaque été, Bobby parcourt les villages ghanéens. Organisant des ateliers de chant et d’instruments pour offrir aux jeunes l’opportunité de développer leur créativité. Pour lui, la musique demeure un langage universel, capable de transmettre confiance et espoir. Cette initiative philanthropique lui vaut des distinctions au sein de la communauté internationale et renforce l’image d’un artiste profondément engagé.
Le retour ponctuel sous les projecteurs
Après vingt-cinq ans loin des scènes. Bobby Sherman surprend de nouveau ses fans en 1998 en participant à la tournée Teen Idol Tour, réunissant les anciennes gloires des années 60 telles que Peter Noone (Herman’s Hermits) et Davy Jones (The Monkees). Les concerts connaissent un succès inattendu, témoignant de l’attachement durable du public à ces chansons intemporelles.
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Ce bref retour n’a rien d’une renaissance durable : Bobby n’envisage pas de relancer sa carrière discographique. À la fin de la tournée, il reprend le chemin des ambulances, préférant l’action concrète aux feux de la rampe.
Un héritage célébré tardivement
En janvier 2025, le magazine TV Guide le classe à la 8ᵉ place de son palmarès des « 25 plus grandes idoles adolescentes de la télévision ». Cette reconnaissance tardive souligne la trace indélébile qu’il a laissée dans la mémoire collective. Tant par ses rôles à la télévision que par ses tubes inoubliables.
Les chaînes spécialisées lui consacrent des documentaires. Compilant images d’archives et témoignages de collègues, d’anciens fans et de membres de sa famille. Il apparaît alors comme un artiste complet, capable de conjuguer succès populaire et générosité hors norme.
Derniers combats et témoignages d’amour
En mars 2025, Brigitte Sherman annonce publiquement que son époux est atteint d’un cancer du rein de stade 4. L’annonce émeut des milliers de personnes, qui lui adressent messages de soutien et prières. Fidèle à lui-même, Bobby partage avec calme et lucidité ses combats contre la maladie. Transmettant un message de courage et d’espoir.
Sa femme souligne combien, jusqu’à la fin, il est resté fort et protecteur. « Même dans les instants les plus difficiles, il a pensé aux autres », confie-t-elle, évoquant l’appel d’une voisine en détresse qu’il avait assistée malgré son épuisement.
Une fin annoncée et un hommage collectif
Tout au long de sa longue carrière, Bobby Sherman a démontré qu’héroïsme ne rime pas nécessairement avec héros médiatique. C’est souvent dans la discrétion du service rendu aux plus vulnérables qu’il se révèle le plus authentique. Les hommages se multiplient : élus locaux, personnalités du monde de la culture et associations humanitaires saluent le parcours d’un homme dont l’élégance de cœur dépasse de loin celle de la scène.
C’est le 24 juin 2025 que Bobby Sherman s’est éteint à l’âge de 81 ans, dans sa demeure d’Encino. En Californie, après un long combat contre un cancer du rein de stade 4. Sa femme, à ses côtés jusqu’au dernier souffle, a partagé la nouvelle dans un communiqué poignant, rendant hommage à « un homme courageux, doux et rayonnant ». Rappelant qu’il « a sauvé des vies » tant sur les planches que dans les rues de Los Angeles.