Le regard Gen Z sur TikTok : la nouvelle moquerie silencieuse qui agace les plus de 30 ans
Depuis quelques semaines, une nouvelle forme de raillerie subtile envahit TikTok, secouant les codes intergénérationnels en entreprise. Alors qu’autrefois le célèbre « ok boomer » symbolisait la défiance des plus jeunes. Une attitude plus muette, épurée et pourtant tout aussi percutante fait parler d’elle : le Gen Z stare.
Bien plus qu’un simple regard, cette posture tacite cristallise la frustration des moins de 30 ans face à des échanges professionnels jugés dépassés ou absurdes. Dans un monde où l’agilité et la réactivité sont valorisées. L’irruption de ce style silencieux révèle un fossé croissant entre les usages traditionnels et la sensibilité numérique des nouvelles cohortes.
Une expression silencieuse du mécontentement
À l’heure des visioconférences et des plateformes collaboratives, la génération Z développe des codes de communication originaux. Là où les visages autrefois s’animaient de sourires ou de grimaces, un simple clignement d’œil ou un silence prolongé suffit désormais à manifester l’énervement. Ces jeunes professionnels, qu’ils soient stagiaires, serveurs ou conseillers bancaires, fixent leur interlocuteur sans ciller, les yeux grands ouverts, sans mot dire.
Cette réaction minimaliste, capturée dans des vidéos de quelques secondes, se prête parfaitement au format de TikTok, où l’impact visuel prime sur la richesse verbale. Quelques vues et likes plus tard, la scène se réplique à l’infini, devenant un réflexe partagé par des centaines de milliers d’utilisateurs.
Le caractère répétitif de ces clips souligne la cohésion de la génération Z et leur envie de redéfinir les rapports hiérarchiques. Cette posture, à la fois détachée et acérée, exprime une contestation sans mots, un moyen de dire « j’en ai assez » sans en avoir l’air.
Crédit : Photo par magnetme, Pixabay (CC0)
Des exemples tirés du quotidien professionnel
Plusieurs internautes se mettent en scène dans leur environnement de travail pour illustrer le Gen Z stare. Une serveuse, confrontée à deux boissons pourtant identifiables à l’œil nu, dégaine un regard glacial lorsqu’on lui demande « lequel est lequel ». Un conseiller bancaire, interloqué, fixe un client qui vient de demander à imprimer une vidéo.
Ces saynètes, filmées souvent depuis un smartphone posé sur un bureau ou un comptoir, montrent des situations simples, presque banales. Le contraste entre la question parfois naïve et la réaction impassible crée un effet comique, renforcé par la musique rythmée et les coupes rapides propres au style TikTok.
Le succès de ces vidéos repose sur cette alchimie subtile entre légèreté et ironie : chaque séquence se lit comme une mini-pièce de théâtre, où le silence pèse plus lourd que n’importe quelle exclamation.
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Crédit : Photo par RobinHiggins, Pixabay (CC0)
Des réactions contrastées selon les générations
Si les moins de 30 ans célèbrent cette posture comme un symbole de leur autonomie et de leur capacité à recadrer poliment, les Millennials et Gen X, eux, l’interprètent souvent comme un signe d’impolitesse affirmée. Dans les commentaires, les débats s’enflamment : certains dénoncent un manque de professionnalisme, d’autres soulignent une absence d’empathie élémentaire.
Certains cadres plus âgés n’hésitent pas à tourner le phénomène en dérision, publiant leurs propres vidéos où ils exagèrent le regard rieur ou outré de la Gen Z. D’autres racontent avoir vécu des moments « traumatisants », face à des silences jugés glaçants.
Cette divergence d’interprétation met en lumière les attentes différentes selon l’âge : un sourire discret ou une plaisanterie passaient pour de la courtoisie, tandis qu’aujourd’hui, le silence calculé devient une arme de communication à part entière.
Les origines d’une nouvelle forme d’interaction
Plusieurs experts pointent du doigt l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les comportements sociaux des jeunes générations. Privés de contacts physiques pendant des mois, ces derniers se sont habitués aux échanges numériques, où les émoticônes et les gifs remplacent souvent la gestuelle et les mimiques d’antan.
Selon Jess Rauchberg, professeure adjointe en technologies de la communication, cette immersion prolongée dans les médias numériques a façonné un registre expressif différent, où la sobriété du visage n’équivaut pas à un manque d’intérêt, mais à une forme d’écoute active recalibrée pour l’ère digitale.
Le recours massif aux messageries instantanées et aux réunions virtuelles a aussi réduit l’entraînement aux interactions en face-à-face, donnant naissance à des réflexes plus distants, comme le Gen Z stare, qui paraît abrupt pour des observateurs peu familiers.
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Crédit : Photo par JESHOOTS-com, Pixabay (CC0)
Un enjeu pour les codes en entreprise
Face à cette tendance, certaines entreprises cherchent à former leurs équipes afin de mieux comprendre ces nouveaux marqueurs non verbaux. Des sessions de sensibilisation aux loisirs numériques et aux codes des réseaux sociaux ont émergé, visant à rapprocher managers et jeunes recrues.
Les DRH s’interrogent sur les risques d’incompréhension pouvant impacter la cohésion d’équipe et la relation client. Le silence peut être perçu comme une résistance, voire une rébellion passive, alors même qu’il s’agit souvent d’une manière de marquer une frontière entre le personnel et le professionnel.
Intégrer ces nouvelles ressources expressives dans la culture d’entreprise passe par un dialogue renouvelé, où la transparence gagne en légitimité. Les managers sont incités à expliquer leurs demandes, à formuler des retours plus précis, à éviter toute ambiguïté qui déclencherait un regard fatal.
Comment réagir face au regard impassible
Pour désamorcer le malaise généré par le Gen Z stare, le premier conseil reste l’adaptation : prendre le temps d’éclaircir la question initiale en reformulant, plutôt que de céder à l’agacement. Montrer sa bonne foi en posant des questions ouvertes peut transformer un moment de tension en échange constructif.
Par ailleurs, certains encouragent les plus âgés à adopter à leur tour quelques codes de la génération Z : un ton plus direct, l’emploi de memes ou d’émoticônes pour alléger l’interaction, voire l’usage d’un bref silence suivi d’une touche d’humour pour rompre la glace.
Au-delà de la prescription de techniques, il s’agit surtout de cultiver la bienveillance et la curiosité, en reconnaissant que chaque génération apporte son lot d’innovations relationnelles. Ce respect mutuel peut réduire le fossé, transformer le Gen Z stare en opportunité d’évolution des pratiques professionnelles.
Gen Z stare, une réponse simple et direct
Le paysage professionnel est en pleine mutation, marqué par l’irruption de codes silencieux et puissants. Le Gen Z stare, avec son allure froide et son efficacité redoutable, symbolise cette transition. Il rappelle que le langage corporel peut devenir un outil d’assertion aussi pertinent qu’une phrase bien tournée.
Dans un univers où l’attention se fragmente, le Gen Z stare offre une réponse simple et directe : un regard suffit désormais à signifier l’exaspération, le mépris ou la désapprobation.
À la croisée des pratiques digitales et des usages anciens, cette posture muette pourrait bien redéfinir les règles du savoir-vivre en entreprise. Mais alors, qu’est-ce que le Gen Z stare exactement ?
Le Gen Z stare se définit avant tout comme ce regard impassible, les yeux grands ouverts, que les moins de 30 ans posent sur un interlocuteur quand celui-ci formule une remarque jugée absurde ou déplacée. Aucun mot n’est prononcé ; tout réside dans l’intensité silencieuse du regard, qui transmet un mélange de dédain et de surprise avec une force rarement atteinte par la parole.