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« Une très mauvaise idée » : fini la carte bancaire, selon les chercheurs, il vaut mieux éviter de payer ses courses avec

Publié par Killian Ravon le 25 Nov 2025 à 15:03

Passer sa carte bancaire à la caisse est devenu un automatisme, surtout pour les courses au supermarché. Pourtant, une vaste méta-analyse publiée en 2024 montre que ce geste banal nous pousserait à dépenser davantage que lorsque nous sortons des billets. Un « effet sans espèces » discret, mais bien réel, qui interroge notre façon de gérer nos dépenses du quotidien.

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Client tendant une carte bancaire au terminal sur un tapis de caisse, avec panier de courses rempli et billets en euros posés devant lui.
À la caisse du supermarché, le geste de la carte remplace les billets et fait parfois grimper la note sans qu’on s’en rende compte.

Et si, en changeant simplement de moyen de paiement, vous voyiez votre budget mensuel d’un autre œil ?

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Payer ses courses par carte, un réflexe devenu presque inconscient

En entrant dans un magasin, la scène est la même pour beaucoup de consommateurs. On remplit le chariot, on attend son tour à la caisse, puis on sort la carte bancaire. Un code, ou un simple geste, et la transaction est réglée. Aucun billet ne quitte le portefeuille, aucune pièce ne tombe sur le tapis. L’argent disparaît en silence, quelque part entre le terminal et le compte courant.

Cette facilité de paiement dématérialisé a été vendue comme un progrès pratique. Tout va plus vite, les files avancent, les erreurs de rendu de monnaie se font rares. Mais saviez-vous que cette commodité pourrait aussi brouiller notre perception réelle de ce que l’on dépense à chaque passage en caisse ?

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Les chercheurs qui se sont penchés sur la question constatent que cette habitude n’est pas neutre. Elle modifie subtilement notre rapport à l’argent, au point d’influencer les montants que nous sommes prêts à débourser pour les mêmes produits. Autrement dit, ce n’est pas le contenu du caddie qui change, mais la manière dont notre cerveau réagit au moyen de paiement utilisé.

Billet et carte bancaire dépassant d’une poche de jean, illustrant la coexistence entre espèces et paiement par carte au quotidien.
Carte et billets qui dépassent de la poche, tout un symbole de nos arbitrages entre cash et plastique.
Crédit : Pixabay / jarmoluk

Une méta-analyse mondiale qui confirme l’« effet sans espèces »

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Pour aller au-delà des impressions, des chercheurs australiens ont compilé et analysé les résultats de 71 études menées dans 17 pays, impliquant environ 11 000 participants. Leurs travaux, publiés en 2024 dans le « Journal of Retailing », se concentrent précisément sur la différence de comportement entre paiement en espèces et paiement par carte.

Le verdict est clair : les paiements dématérialisés sont associés à des dépenses plus élevées que les transactions en cash. Les auteurs parlent d’un effet sans espèces qualifié de « faible », mais « significatif ». En langage scientifique, cela signifie que l’ampleur n’est pas gigantesque à chaque achat, mais assez régulière et robuste pour être prise au sérieux.

Concrètement, chaque fois que l’on sort la carte plutôt que les billets, on a tendance à accepter un montant un peu plus élevé, à ajouter un produit de plus, à craquer pour un petit extra que l’on aurait peut-être laissé en rayon avec de l’argent liquide. Individuellement, ces écarts peuvent paraître minimes. Mais répétés semaine après semaine sur toutes les dépenses du quotidien, ils finissent par peser sur le budget mensuel de nombreux foyers.

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Les chercheurs insistent d’ailleurs sur le caractère global de cet effet. Il ne dépend ni d’un pays précis, ni d’un type de commerce particulier. C’est un mécanisme que l’on retrouve dans des contextes variés, ce qui laisse penser qu’il tient davantage à la psychologie humaine qu’aux spécificités d’un marché national.

Terminal de paiement affichant une transaction acceptée avec une carte bancaire insérée, sur fond uni rappelant la simplicité du geste.
Un simple bip sur le terminal, et l’achat est validé avant même que l’on ait réalisé la dépense.
Crédit : Pixabay / PabitraKaity

Comment la carte fait oublier la « douleur de payer »

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Pourquoi la carte bancaire nous pousse-t-elle à sortir plus d’argent qu’un simple billet de 20 euros ? L’un des économistes cités par la BBC, relayée par L’Internaute, avance une explication simple. Selon lui, la grande facilité de ce moyen de paiement encourage les consommateurs à acheter sans trop réfléchir, et même à se laisser tenter par des choses dont ils n’ont pas réellement besoin.

En quelques secondes, le terminal affiche « paiement accepté ». Le geste est fluide, presque ludique. On ne voit pas l’argent sortir, on ne ressent pas cette petite hésitation au moment de compter les billets. Ce manque de friction réduit ce que les chercheurs appellent parfois la douleur de payer, cette légère résistance intérieure qui nous pousse à vérifier deux fois avant de passer à l’acte.

Avec un paiement dématérialisé, cette sensation s’atténue. On se focalise davantage sur ce que l’on gagne – les produits, le confort, l’instant – que sur ce que l’on perd – une partie de son compte bancaire. Ce décalage psychologique suffit à rendre les hausses de panier plus fréquentes, surtout pour des achats impulsifs ou peu planifiés.

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Ce mécanisme est d’autant plus fort que, dans beaucoup de foyers, les paiements par carte se succèdent à un rythme soutenu. Courses, sorties, plein d’essence, petits achats en ligne : la somme de ces gestes rapides peut finir par surprendre au moment de consulter le relevé.

Sac d’argent stylisé entouré de cartes bancaires colorées et de pièces empilées, suggérant l’accumulation de petites dépenses électroniques.
Quand les cartes s’empilent, les petites sommes finissent vite par peser lourd sur le porte-monnaie.
Crédit : Pixabay / PabitraKaity

Quand le liquide sert de garde-fou invisible

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À l’inverse, payer en billets offre un retour immédiat et visible sur ce que l’on dépense. Un autre universitaire cité dans l’étude rappelle que l’argent liquide agit comme un repère concret. Voir les billets diminuer dans le porte-monnaie, sentir les pièces que l’on remet au commerçant, tout cela rappelle en temps réel que l’on puise dans une réserve limitée.

Ce « moment douloureux » au passage en caisse n’est pas seulement symbolique. Il retient certains consommateurs au dernier instant. On repose un article, on renonce à un produit superflu, on se contente de l’essentiel. Cette résistance peut paraître inconfortable, mais elle joue un rôle de frein naturel dans la psychologie des paiements.

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Beaucoup de personnes qui gèrent leur budget en enveloppes de cash témoignent d’ailleurs de ce phénomène. Sans même citer de chiffres, elles expliquent qu’une fois l’enveloppe hebdomadaire pour les courses au supermarché fixée, chaque billet sorti est un signal clair. Quand l’argent baisse trop vite, les arbitrages deviennent concrets, et les achats impulsifs se réduisent.

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Le paiement en espèces n’est évidemment pas magique. On peut tout à fait se laisser aller, même avec des billets. Mais il expose davantage la réalité de la dépense et oblige à regarder son argent disparaître, là où la carte rend cette disparition plus abstraite.

Gros plan sur un terminal de paiement et une carte glissée dans la fente, sur une table colorée, évoquant un achat du quotidien.
À peine insérée, déjà oubliée, la carte fait disparaître la dépense en quelques secondes.
Crédit : Wikimedia Commons / Mañico – CC0

Ce que les chercheurs attendent des consommateurs et des décideurs

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Les auteurs de la méta-analyse ne se contentent pas de décrire un phénomène. Ils espèrent que leurs conclusions seront prises en compte par un large public : universitaires, professionnels, mais aussi consommateurs et responsables politiques. L’effet sans espèces n’est pas un détail anecdotique, surtout dans un contexte où les paiements numériques gagnent du terrain partout.

Pour les ménages, l’enjeu est très concret. Comprendre que le choix du moyen de paiement influence le montant des achats peut les aider à reprendre la main sur leur budget mensuel. Certains décideront peut-être de réserver la carte aux dépenses incontournables et de revenir à l’argent liquide pour une partie des dépenses du quotidien. D’autres instaureront des règles simples, comme retirer un montant fixe en début de semaine pour les courses, afin de visualiser plus clairement ce qui part.

Du côté des professionnels, ce type de résultat peut aussi nourrir la réflexion. Les commerçants savent depuis longtemps que plus un paiement est fluide, plus le panier moyen a tendance à grimper. Mais la question éthique se pose : jusqu’où est-il souhaitable de simplifier le passage en caisse si cela fragilise certains clients sur le plan financier ?

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Quant aux décideurs publics, ils pourraient être amenés à intégrer ces données dans leurs politiques de sensibilisation au budget ou d’éducation financière. L’objectif ne serait pas de limiter l’usage des cartes, mais de mieux informer sur leurs effets psychologiques, au même titre que l’on prévient des risques de certains crédits à la consommation.

Terminal de paiement installé sur une caisse automatique de supermarché, écran allumé prêt à enregistrer un achat en libre-service.
Aux caisses automatiques, le geste de paiement s’enchaîne encore plus vite, sans témoin ni billet sorti.
Crédit : Wikimedia Commons / Anselm Schüler – CC BY-SA 4.0

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Faut-il vraiment abandonner la carte à la caisse ?

Alors, doit-on en conclure qu’il faut bannir la carte bancaire à la caisse du supermarché ? Les chercheurs ne vont pas jusque-là, et ils rappellent que l’effet observé reste modeste, même s’il est bien réel. Le paiement dématérialisé reste pratique, sécurisé et souvent incontournable pour certains achats en ligne ou à distance.

L’enjeu est plutôt de reprendre le contrôle sur la manière dont on l’utilise. Cela peut passer par de petits ajustements : consulter plus souvent ses relevés, fixer un plafond mental pour les dépenses du quotidien, garder une partie de ses achats en argent liquide pour garder le contact avec la réalité des prix. Ce détail que peu de gens connaissent, c’est que la simple matérialité de l’argent, ou son absence, suffit à orienter nos comportements.

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Au fond, la « très mauvaise idée » n’est peut-être pas de payer avec une carte en soi, mais de le faire sans se rappeler qu’à chaque geste sur le terminal, on contourne un signal naturel de notre cerveau. Et la vraie révélation de cette méta-analyse, c’est que le moyen de paiement, longtemps considéré comme un simple outil technique, fait lui aussi partie des leviers qui influencent nos choix de consommation, parfois bien plus qu’on ne l’imagine.

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5 commentaires

  • b
    bonsens06
    19/11/2025 à 07:52
    Pour des paiements inferieurs à 8 euros des paiements en especes, surtout avec les pieces ( creation d'une piece de 5 et ou de 10 !?) emettent 1 à 2 g de CO2 contre 3-4 g avec les cartes . Vu le nombre de ces transactions cela devient monstrueux .Payer en émettant moins , voila un vrai acte citoyen ! Durabilité des pieces 40 ans , reduction de la logistique bancaire,moins de serveurs mobilisés et moins de données stockées . Mais ou sont nos decideurs pour ne pas nous sensibiliser a la question ? Incroyable .
  • t
    tout y va
    17/11/2025 à 09:51
    Comment ne pas constater que le paiement par carte est un trompe cerveau.Fallait-il qu'une étude soit faite pour s'en apercevoir ?Pensez vous que tous les citoyens de France et de Navare ont besoin de ces études ?NULLITE de ceux qui pensent penser pour les autres....
  • C
    Caro
    16/11/2025 à 22:36
    Je suis entièrement d’accord avec ces analyses.Depuis que j’utilise le paiement de certains de mes achats en espèces, je suis revenue à la réalité…Les fins de mois sont beaucoup moins difficiles…Nous devrions tous payer en espèces pour tout à chaque fois qu’il est possible de le faire…CQFD

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