Il disait vouloir se retirer pour des « problèmes de santé » : un évêque français forcé à la démission par le pape en raison de « relations avec des femmes »
Deux jours après des mises au point inhabituelles de la nonciature, l’affaire secoue le diocèse de Verdun. Officiellement, l’ancien évêque Jean-Paul Gusching avait quitté ses fonctions fin septembre pour raisons de santé.
En coulisses, la nonciature assure avoir alerté Rome au sujet de « relations envers des femmes ». Conduisant le pape Léon XIV à solliciter sa démission. Une enquête canonique est désormais ouverte.
Une démission qui, derrière la santé, cache une autre réalité
Fin septembre, l’ancien évêque de Verdun annonce son retrait, évoquant des « problèmes de santé ». Le calendrier semblait simple, presque discret, avec une prise d’effet fixée au 27 septembre.
Mais la communication rare de la nonciature, diffusée le 5 novembre puis relayée le lendemain, change la perspective. Elle explique avoir reçu des informations sur des « relations envers des femmes » entretenues par le prélat, contraires à ses engagements sacerdotaux. Alerté, le Saint-Siège s’en est saisi.
La nuance est de taille : la santé n’est plus le motif central, seulement « un élément » de la décision. Cette précision, inhabituelle par son ton et son contenu, replace la démission dans un cadre disciplinaire.
Elle dit aussi quelque chose de la manière dont l’Église, en France, traite désormais les situations jugées incompatibles avec la vie sacerdotale. Mais saviez-vous que, pour ce type de manquements. Le droit canon prévoit des étapes très balisées. De la vérification préliminaire aux mesures conservatoires ?
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Le rôle clé de la nonciature et la saisine de Rome
Dans ce dossier, la nonciature apostolique en France est centrale. C’est elle qui, après des signalements, a prévenu Rome. Dans son communiqué, elle précise que l’intéressé s’était engagé auprès du Saint-Siège à éviter tout comportement envers des femmes susceptible d’être interprété comme contraire à ses vœux. Cet engagement n’a pas suffi. « Compte tenu de la persistance de la situation », le pape Léon XIV a « sollicité et accepté » la démission du gouvernement du diocèse de Verdun.
Le choix des mots est révélateur. On n’évoque pas une simple renonciation personnelle : on parle d’une démission demandée et acceptée. Le signal est clair pour les fidèles comme pour le clergé. Dès lors que des faits apparaissent incompatibles avec l’état sacerdotal, l’autorité pontificale peut intervenir rapidement. Et dans ce cas, elle l’a fait.
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Des mesures conservatoires strictes, loin de Verdun et d’Amiens
En attendant l’issue de la procédure, l’ancien évêque est invité à une vie retirée, dans un lieu situé hors de son diocèse d’origine (Amiens) et de celui de Verdun. À cela s’ajoute l’interdiction de toute célébration liturgique et de toute activité pastorale publique. Ce type de mesures, que l’on qualifie de conservatoires, vise à protéger les personnes, à prévenir les confusions et à laisser l’enquête suivre son cours sans pression publique.
Dans les faits, cela signifie l’éloignement des lieux où le prélat a exercé, la suspension de visibilité et l’arrêt des missions qui l’exposeraient au contact pastoral. Une manière de préserver la communauté diocésaine tout en respectant le principe de présomption d’innocence sur le plan civil. Ce détail que peu de gens connaissent : en droit canonique, ces mesures ne préjugent pas de la sanction finale ; elles encadrent une période d’examen des faits.
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Une enquête canonique préliminaire et un signalement à la justice
La nonciature évoque l’ouverture d’une enquête canonique préliminaire. Cette étape consiste à vérifier la crédibilité des informations, à entendre des témoignages et à établir si des infractions au droit de l’Église sont susceptibles d’être retenues. Si oui, le dossier peut être transmis aux instances compétentes, parfois jusqu’au Dicastère romain compétent pour ces questions.
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Dans le même mouvement, un signalement à la justice civile a été effectué. Ici, l’intention est double : coopérer avec les autorités de l’État quand des faits susceptibles de relever du pénal sont évoqués, et clarifier les responsabilités.
L’Église catholique en France a, ces dernières années, multiplié ce type de signalements lorsqu’un doute sérieux apparaît. L’idée n’est pas de se substituer au juge, mais d’assurer que rien ne soit laissé dans l’ombre.
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Verdun, Amiens, Rome : ce que cela dit du moment ecclésial
Le nom de Verdun renvoie à un diocèse marqué par une histoire forte, un territoire où l’empreinte catholique reste visible. Celui d’Amiens, diocèse d’origine de l’ancien évêque, inscrit l’affaire dans une géographie religieuse familière aux fidèles du nord de la France. Et puis il y a Rome, évidemment : la nonciature, relais diplomatique du Saint-Siège à Paris, et le pape Léon XIV, qui a assumé la décision finale.
Derrière ces toponymes, un même message : la volonté d’assainir quand des comportements s’éloignent des exigences sacerdotales. La communication, inhabituelle, s’inscrit dans un contexte où l’institution cherche à expliciter ses décisions, à justifier ses choix et à protéger les personnes. Les fidèles ont besoin de comprendre le pourquoi et le comment ; l’Église, désormais, montre davantage son processus.
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Ce que l’on sait… et ce que l’on ne sait pas encore
À ce stade, le communiqué ne détaille ni la nature précise des relations évoquées ni l’étendue temporelle des faits. Il n’indique pas non plus le lieu exact de résidence où vit désormais l’ancien évêque. C’est en réalité le propre d’une phase préliminaire : elle ne vise pas la publicité, mais la recherche des éléments nécessaires pour statuer. La seule certitude, c’est qu’il faudra attendre les conclusions de l’enquête canonique, d’un éventuel procès interne ou d’un classement si les faits ne sont pas établis.
Dans l’intervalle, les diocèses concernés devront accompagner les communautés, répondre aux interrogations et éviter de laisser s’installer de fausses rumeurs. Le communiqué de la nonciature, rare et circonstancié, visait précisément cela : poser un cadre, rappeler des faits et expliquer les mesures déjà prises. Quant au volet civil, il suivra sa propre temporalité, distincte de celle de l’Église.
En définitive, l’épisode rappelle combien l’exemplarité demeure une exigence indissociable de la charge épiscopale. Et il s’achève, pour l’instant, sur une révélation lourde de conséquences : un signalement a bien été transmis à la justice civile, parallèlement à l’enquête canonique en cours.