La HAS déconseille désormais un test sanguin très fréquent : ce qu’il faut comprendre de cette recommandation
La vitesse de sédimentation, un test sanguin réalisé des millions de fois chaque année en France. Vient d’être officiellement reléguée au second plan. La Haute Autorité de santé (HAS) estime qu’elle n’apporte plus de véritable bénéfice médical dans les situations évaluée. Et recommande de ne plus la prescrire.
Derrière cette décision annoncée le 17 novembre 2025. C’est toute une façon de surveiller l’inflammation qui est appelée à évoluer, au profit d’analyses jugées plus modernes et plus fiables. Comme le dosage de la protéine C-réactive. Mais saviez-vous que ce test pourtant critiqué continue encore d’être facturé des millions de fois à l’Assurance-maladie ?
Pourquoi la HAS tourne la page de ce test sanguin
Depuis des décennies, la vitesse de sédimentation fait partie des réflexes de base dans les cabinets médicaux et les laboratoires. Cet examen a longtemps été considéré comme un indicateur simple, disponible partout, pour repérer une éventuelle réaction inflammatoire dans l’organisme.
La HAS rappelle toutefois que ses recommandations. Même si elles restent consultatives sur le plan juridique, sont en pratique largement suivies par les pouvoirs publics. Lorsqu’elle estime qu’un examen n’a pas démontré d’intérêt médical suffisant. La question de son maintien dans les habitudes de prescription se pose rapidement.
Dans son communiqué, l’autorité sanitaire va même plus loin. Pour les indications qu’elle a évaluées, la mesure de la vitesse de sédimentation « n’a pas démontré d’intérêt médical ». Autrement dit, dans les situations de soins courants passées au crible, l’examen ne change. Ni le diagnostic ni la prise en charge de manière suffisamment utile.
Vitesse de sédimentation : comment fonctionne cet examen ?
Concrètement, la vitesse de sédimentation est mesurée à partir d’une simple prise de sang. Le prélèvement est placé dans un tube vertical, puis on observe à quelle vitesse les globules rouges tombent au fond. Plus ils se déposent rapidement, plus cela suggère la présence d’un phénomène inflammatoire.
En cas d’inflammation, la composition du sang se modifie. Certains composants favorisent l’agrégation des globules rouges, qui chutent alors plus vite dans le tube. À l’inverse, lorsqu’il n’y a pas de réaction inflammatoire notable, cette descente est plus lente.
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Sur le papier, l’idée paraît simple et séduisante. Un geste technique minimal, un résultat chiffré facile à suivre. Et la possibilité de comparer des résultats d’analyse au fil du temps. C’est ce qui a contribué à installer cet examen de laboratoire dans le paysage médical français pendant de longues années. Mais la réalité se révèle beaucoup moins idéale.
Un test jugé imprécis, peu réactif et peu spécifique
Premier reproche majeur formulé par la HAS : le manque de précision. Si l’on répète la vitesse de sédimentation plusieurs fois sur un même échantillon de sang, les valeurs obtenues peuvent varier sensiblement d’une mesure à l’autre. Pour un médecin, cela signifie qu’il est difficile de s’appuyer sur ce chiffre pour suivre finement l’évolution d’un patient.
Deuxième limite pointée : le manque de réactivité. L’inflammation peut mettre un certain temps avant de se traduire par une augmentation de la vitesse de sédimentation. Résultat, un patient peut présenter une maladie inflammatoire débutante, avec des symptômes bien réels, tout en affichant une valeur de VS encore dans la norme. Ce décalage complique l’interprétation et peut donner un faux sentiment de sécurité.
Troisième problème, et non des moindres : la faible spécificité. De nombreux facteurs sans rapport direct avec une maladie inflammatoire peuvent modifier le résultat, à commencer par l’âge et le sexe. Deux personnes en bonne santé, mais de profils différents, peuvent ainsi obtenir des chiffres éloignés sans qu’aucune pathologie ne l’explique réellement. Pour les cliniciens, cette prescription médicale devient alors plus source de confusion que d’éclairage.
Un examen de routine qui pèse lourd sur l’Assurance-maladie
Malgré ces limites, la vitesse de sédimentation est restée extrêmement répandue en France. La HAS rappelle qu’elle a été « très largement utilisée depuis plusieurs décennies », au point de devenir une sorte de réflexe dans certains bilans.
L’examen est ainsi souvent demandé dans le cadre d’un bilan de routine chez des patients ne présentant aucun symptôme particulier. Une simple visite de contrôle, quelques lignes de plus sur l’ordonnance, et la VS se retrouve ajoutée à la série d’analyses.
En 2023, ce test a encore été réalisé environ 16 millions de fois dans le pays. Ce volume colossal se traduit par une facture d’environ 12 millions d’euros pour l’Assurance-maladie. À l’échelle d’un système de santé, cet argent représente autant de ressources qui pourraient être réorientées vers des examens jugés plus pertinents.
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C’est ce décalage entre coût cumulé et bénéfice médical limité qui a fini par attirer l’attention des autorités. La HAS ne parle pas seulement d’un test vieillissant, mais bien d’un acte qui ne se justifie plus, compte tenu des alternatives disponibles.
Vers des examens plus modernes pour suivre l’inflammation
Dans ses recommandations, la HAS ne se contente pas de critiquer l’ancienne méthode. Elle invite explicitement les médecins à privilégier d’autres outils, déjà remboursés par l’Assurance-maladie et considérés comme plus performants pour détecter et suivre une inflammation.
En première ligne figure le dosage de la protéine C-réactive, souvent abrégée en CRP. Là où la vitesse de sédimentation réagit lentement et de manière peu spécifique, la CRP est réputée beaucoup plus sensible aux variations rapides de l’état inflammatoire. Sa valeur peut monter ou redescendre en peu de temps, ce qui aide le médecin à évaluer l’évolution d’une infection ou d’une maladie inflammatoire.
D’autres paramètres issus de la prise de sang peuvent également être mis en avant selon le contexte clinique, mais la HAS insiste sur un point : ces alternatives sont déjà intégrées dans la nomenclature et prises en charge. Il ne s’agit donc pas d’alourdir les dépenses, mais plutôt de remplacer un examen peu utile par des marqueurs considérés comme plus fiables.
Ce qui change pour les patients et les médecins
Pour les patients, cette recommandation ne se traduira pas par une révolution visible du jour au lendemain. Une prise de sang restera une prise de sang : même laboratoire, même aiguille, mêmes tubes colorés posés sur le plateau. Ce qui changera, ce sont les tests effectués à partir de cet échantillon.
Là où une ordonnance comportait parfois automatiquement la vitesse de sédimentation, les médecins devraient progressivement lui préférer la CRP ou d’autres marqueurs, en fonction de la question clinique posée. Concrètement, cela pourrait éviter des résultats déroutants, avec une VS normale malgré des symptômes bien présents, ou au contraire un chiffre élevé sans explication évidente.
Pour les professionnels de santé, cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus large visant à vérifier régulièrement la pertinence des actes de soins. La HAS rappelle que ses travaux visent à promouvoir « le bon examen, au bon moment, pour le bon patient ». La disparition annoncée de la VS des ordonnances en est une illustration très concrète.
Et la révélation finale, c’est que ce test longtemps perçu comme un incontournable des bilans sanguins ne devrait plus, selon la HAS, être prescrit du tout à l’avenir, tant son intérêt médical est désormais jugé insuffisant au regard des outils disponibles.