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#PiscinesPourToustes : des femmes se battent pour pouvoir se baigner en burkini

Publié par Brandon Clouchoux le 09 Juil 2021 à 16:30

Voilà maintenant 3 ans que le syndicat Alliance Citoyenne – et son groupe dédié aux femmes libres et voilées – interpellent le maire de Grenoble. Leur objectif ? Autoriser le port du burkini dans les piscines municipales. En 2021, le combat semble encore battre son plein avec de nombreuses affiches placardées dans la ville.

Le militantisme de ces femmes

Les affiches colorées ont été placées dans le « lieu idéal » pour militer, à l’entrée de la piscine municipale Jean Bron, à Grenoble. « Monsieur le Maire, laissez-nous choisir notre maillot » , peut-on lire sur ces dernières. Un message court, certes… Mais pleins de convictions. Les collages de ces affiches ont été effectués entre le samedi 3 et dimanche 4 juillet 2021, par des militantes féministes de l’Alliance Citoyenne et de Nous Tous.tes.

« Mon corps, mon maillot, mon choix » est également un des messages visibles depuis un bâtiment de la ville : une mobilisation qui tente de faire réagir le maire, Eric Piole (EELV).

La vidéo du jour

Un combat qui rassemble d’autres organisations, telles que le collectif féministe local Nous Toustes 38, qui souhaite apporter des changements à cette vision du féminisme : « On ne s’appelle plus Nous Toutes mais Nous Toustes, pour inclure les personnes trans » , souligne une des militantes à Auféminin.

Un courrier a été adressé au maire de Grenoble, par les deux collectifs, concernant les règles d’accès aux piscines municipales. « Ce règlement impose une standardisation sexiste, raciste et exclut toutes les personnes qui ne se reconnaissent pas dans le port d’un maillot de bain dit ‘féminin et traditionnel » , déclarent les militantes, à travers cette lettre.

Afin de répondre à cette lettre, deux élues de la mairie ont accepté de recevoir les militantes, cette semaine. Un pas jugé « trop timide » selon les femmes, qui attendent des « changements concrets » depuis 2018. En ce qui concerne le maire de Grenoble, il refuse toujours de les recevoir. Il se dédouane en quelque sorte du problème, en adressant un courrier daté du 18 juin 2021 à Jean Castex, afin que ce soit le gouvernement qui prenne une décision concernant le burkini, pour l’ensemble de la France.

Le 1er juin dernier, plusieurs députés socialistes et de la majorité présidentielle ont fait supprimer un amendement qui prévoyait l’interdiction du burkini dans les piscines françaises. Pourquoi les militantes mènent alors un combat acharné ?

Burkini dans les piscines : Une réticence qui persiste

Le règlement intérieur des piscines municipales à Grenoble stipule que le port du burkini est interdit pour « des raisons d’hygiène » . Par ailleurs, un collectif de femmes ont fait acte de « désobéissance » à l’égard de cette règle, en 2019. Depuis ces actes, le maire de Grenoble a ainsi expliqué à 20 minutes que « les conditions d’un dialogue serein n’étaient pas réunies pour échanger en bonne intelligence » . Néanmoins, la version des faits n’est pas la même, du côté de la partie adverse : selon l’Alliance citoyenne la raison était totalement différente puisque le cabinet du maire préparait sa campagne de réélection.

Suite à sa campagne, Eric Piolle est de nouveau réélu en 2020 mais, il est désormais en campagne pour les Primaires d’Europe Ecologie Les Verts (PEELV), en vue de la présidentielle 2022. D’après des hypothèses, on peut estimer que lorsqu’il interpelle Jean Castex à travers son courrier, il ne précise pas qu’il n’a jamais voulu rencontrer les militantes concernées par le port du burkini depuis 2018. Certes, leur accorder ce droit (de se baigner) serait un choix courageux, mais peut-être pas sans conséquence pour le maire, qui peut se voir « perdre des votes » parmi l’électorat conservateur.

Une décision qui se discute depuis maintenant plusieurs années et qui pendant ce temps, continue d’attrister certaines personnes, comme c’est le cas pour Taous, une militante. Selon elle, ce problème s’assimile à une violence raciste et islamophobe systémique, conduisant inévitablement à un « boycottage » des femmes voilées hors de l’espace public. Également très investie en tant que parent d’élève, cette femme partage ce qu’éprouvent les étudiantes voilées qui ne peuvent plus participer aux sorties scolaires. « C’est difficile pour les femmes voilées parce qu’on est déjà agressées et violentées au quotidien. Moi-même, j’ai besoin d’un suivi psy. Quand on vous discrimine sur quelque chose qui vous échappe, c’est hyper violent » , affirme, par la même occasion Taous, indignée par la situation.

>>> À lire aussi : #PasToucheAmonHijab : le cri du cœur des femmes musulmanes après l’interdiction du voile…

Passer à l’offensive pour ces militantes

D’abord, ce sont des courriers, puis par manque de réponses, le groupe des militantes préfère passer à l’offensive : des « opérations nécessaires selon elles« . C’est en mai 2019 à la piscine Les Dauphins, puis le 23 juin 2019 à la piscine Jean Bron, que les femmes ont fait une opération de « désobéissance non violence » .

Personne ne leur refuse l’accès, néanmoins, au moment de quitter les lieux, l’équipe d’une trentaine de femmes se retrouve nez à nez avec « 4 ou 5 cars de CRS » . Dans ce groupe de femmes, il y a 7 femmes portant le foulard, et ayant défié le règlement, qui ont été identifiées par la police, et qui ont reçu une amende de 35 euros, selon le journal France Bleu Isère.

En ce qui concerne le public présent sur place, selon Taous, il était « totalement favorable à leur présence« . D’après cette même militante, elle se voit dans l’obligation d’essayer des piscines seule avant de savoir si la présence de ses enfants est possible, une façon pour elle, de les protéger de la « discrimination » qu’elle subit. « Une fois, on m’a refusé d’accéder à la baignade dans des lacs, en famille ! J’étais tellement en colère que depuis, je fais ce que je peux pour épargner mes enfants. J’ai été éjectée à plusieurs reprises toute seule » .

Quelques évolutions dans le débat autour du burkini

Ce n’est pas la première fois, puisqu’en 2018, une femme portant le voile s’est vu, elle-aussi, refusée l’accès. Elle a saisi le Défenseur des droits, l’organisme lui a rendu un rapport : « L’établissement mis en cause [devait] rapporter la preuve, notamment par des données et/ou études scientifiques, que son refus [était] fondé sur des éléments objectifs et non discriminatoires » . Une preuve impossible puisqu’à l’heure actuelle, aucune étude n’a été faite dans l’objectif de démontrer la dangerosité du burkini, en termes d’hygiène ou de sécurité dans les piscines.

Malgré tout, la situation semble connaître des avancées considérables : l’Assemblée nationale, le ministère des Sports, l’Observatoire de la laïcité, le Conseil d’Etat, et le Haut commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU ont pris une position favorable au débat du burkini dans les piscines municipales.

Notons par la même occasion que seulement 1% des 80 000 nageurs(ses) qui fréquentent les piscines municipales tous les mois, sont concernés le burkini.

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