Une étude révèle une stratégie inédite pour extraire d’énormes quantités de CO₂ de l’air
Une méthode inédite permettrait de réduire jusqu’à 0,4 °C la température mondiale : enfouir profondément les déchets de bois issus des forêts gérées pour extraire du CO₂ de l’air.
Des chercheurs de l’université Cornell proposent une technique simple et durable pour capter le carbone. Une nouvelle étude révèle qu’enfouir les résidus de bois issus de l’abattage et du sciage pourrait extraire d’énormes quantités de CO₂ de l’atmosphère, au point de refroidir la planète jusqu’à 0,4 °C.
Capturer le carbone à moindre coût
Réduire la concentration de dioxyde de carbone (CO₂) dans l’atmosphère est essentiel pour atténuer le changement climatique. Des chercheurs de l’université Cornell proposent une solution économique, durable et techniquement simple : enfouir les résidus de bois issus de forêts gérées.
Pourquoi le bois ?
Les forêts gérées, exploitées principalement pour la production de bois, génèrent de grandes quantités de résidus ligneux. Ce matériau est généralement brûlé ou laissé à se décomposer, libérant ainsi du carbone dans l’atmosphère.
Cependant, lorsqu’ils sont enfouis à au moins 2 mètres de profondeur, ces résidus peuvent être conservés dans le sol pendant des siècles, voire des millénaires, ce qui empêche le rejet de CO₂. Le sol agit comme un isolant naturel, en réduisant l’oxygène disponible et en ralentissant considérablement la décomposition. Ainsi, le carbone reste durablement piégé.
Enfouir les déchets de bois ne permet pas une capture directe du CO₂ atmosphérique, comme le ferait une plante en croissance ou une technologie spécialisée. Cette méthode empêche plutôt le carbone déjà stocké dans le bois de retourner dans l’atmosphère.
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Lorsque les arbres poussent, ils absorbent le CO₂ de l’air par photosynthèse. Le carbone est alors stocké dans leurs tissus. Si l’arbre est abattu et que ses restes se décomposent ou sont brûlés, le CO₂ est libéré. En enfouissant ces résidus, on interrompt ce cycle naturel, empêchant ainsi des émissions futures. Il s’agit donc d’une forme de captation passive, et non active.
Adieu CO₂ : un impact climatique mesurable
Selon l’étude publiée dans Nature Geoscience, si cette technique était appliquée à l’échelle mondiale durant les 76 prochaines années, elle pourrait permettre de retirer entre 770 et 937 gigatonnes de CO₂, soit une réduction potentielle de la température globale allant jusqu’à 0,42 °C.
Par exemple, si les États-Unis enfouissaient 66 % des résidus ligneux issus de leurs forêts gérées, ils pourraient atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
Peut-on vraiment enfouir du bois à grande échelle ?
L’une des questions les plus fréquentes concernant cette proposition concerne sa faisabilité technique et énergétique. Enfouir des résidus ligneux à 2 mètres de profondeur ne peut se faire manuellement. Cela nécessite des machines lourdes, du carburant, de la main-d’œuvre et une logistique spécialisée.
Ce n’est donc pas une solution sans coût. Toutefois, les chercheurs raisonnent en termes d’efficacité carbone nette, c’est-à-dire que l’on compare la quantité de CO₂ captée aux émissions générées par le processus. Ils estiment que, même en prenant en compte les besoins en transport et en excavation, le bilan reste positif dans des contextes bien organisés. Cela notamment lorsque :
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Les infrastructures forestières existantes sont utilisées ;
le creusement est effectué de manière planifiée et regroupée (par exemple lors de campagnes annuelles) ;
un grand volume de déchets est enfoui sur un même site, ce qui optimise les ressources, et
les machines sont alimentées par de l’énergie renouvelable
Par ailleurs, il ne s’agit pas d’appliquer cette méthode partout sans discernement. Mais uniquement dans des zones où les déchets sont abondants et où les conditions logistiques sont favorables.
Ne vaudrait-il pas mieux éviter de couper les arbres ?
Cette stratégie n’implique pas d’abattre davantage d’arbres. Elle repose au contraire sur les déchets déjà produits dans les forêts gérées.
Les forêts gérées ne doivent pas être confondues avec une déforestation incontrôlée. Ce sont des zones où le bois est exploité de manière planifiée. Elles sont gérées avec rotation des cultures forestières, reboisement et suivi écologique. Ces activités génèrent déjà de grandes quantités de déchets ligneux : branches, troncs déformés, écorces et racines non commercialisables.