Linky : ce détail qui fait monter la pression chez certains foyers à l’approche de 2025
À l’approche de 2025, une partie des ménages équipés d’un compteur Linky redoute de voir arriver des visites inattendues.
En toile de fond, une lutte anti-fraude qui se durcit et une question qui revient partout : jusqu’où un contrôle peut-il aller… quand on n’a rien à se reprocher ?
Un compteur devenu banal… mais pas neutre
Au départ, Linky s’est imposé dans le quotidien comme un objet presque invisible, accroché dans un placard, sur un palier ou dans un local technique. Pourtant, il suffit de quelques mots — « vérification », « anomalie », « intervention » — pour que l’ambiance change.
Ce qui inquiète aujourd’hui, ce n’est pas seulement l’idée d’un passage d’agent. C’est l’impression d’une mécanique qui peut s’emballer vite, surtout quand la facture d’électricité est déjà un sujet sensible et que la moindre variation de consommation peut être mal interprétée.
D’autant que ces contrôles s’inscrivent dans un contexte où l’on parle de plus en plus de fraude électrique. Et là, un détail que peu de gens connaissent entre en jeu : quand la fraude augmente, les contrôles s’étendent… et la perception change, y compris chez des clients parfaitement réguliers.
Crédit : Wikimedia Commons / CC BY-SA 4.0
Quand la triche se transforme en promesse sur les réseaux
La fraude, elle, ne se cache plus forcément dans l’ombre. Elle se diffuse aussi sous forme de « bons plans » présentés comme simples, rapides, et presque sans risque. Sur TikTok ou Telegram, certains vendeurs mettent en avant des promesses spectaculaires de baisse de facture, comme si l’électricité devenait un abonnement négociable à la baisse.
Le discours est souvent le même : payer moins, sans changer ses habitudes, en contournant le comptage. Or, derrière ces promesses, il est question de manipulations illégales et payantes, parfois proposées pour quelques centaines d’euros.
Les méthodes évoquées tournent autour de modifications matérielles, avec par exemple l’installation de systèmes de dérivation destinés à fausser ce que le compteur enregistre réellement. Dit autrement, on ne parle pas d’une optimisation “maligne”, mais d’un contournement.
Et c’est précisément ce type de pratiques, massivement relayées, qui nourrit la crispation actuelle : plus ces offres circulent, plus la riposte se durcit. Mais saviez-vous que cette riposte ne s’appuie pas seulement sur des visites sur le terrain ?
Des contrôles qui tombent sans prévenir : l’angoisse du « faux positif »
Quand un foyer entend parler de contrôles surprise, la peur n’est pas toujours celle d’être pris “la main dans le sac”. La peur, c’est aussi celle d’être soupçonné à tort.
Parce qu’un logement peut connaître des périodes atypiques. Un départ prolongé, une maison laissée vide, un changement d’habitudes, un appareil en panne, ou au contraire un nouvel équipement qui change la donne. Sur le papier, tout cela peut créer une consommation “bizarre”, sans qu’il y ait la moindre fraude derrière.
Dans ce climat, certains consommateurs craignent une inversion silencieuse : ne plus être présumés “normaux” jusqu’à preuve du contraire, mais devoir se justifier quand un signal s’allume. La question de la présomption d’innocence revient alors, non pas comme un débat théorique, mais comme un réflexe de protection.
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Ce malaise tient aussi à une idée simple : une accusation, même injuste, peut coûter du temps, de l’énergie et parfois de l’argent. Et c’est là que le sujet des procédures et des preuves devient central.
Crédit : Wikimedia Commons / CC0
Les données de consommation au cœur de la traque
Pour repérer les fraudes, Enedis s’appuie sur une approche technologique avancée. Le principe repose sur l’analyse des données de consommation issues du compteur, enregistrées plusieurs fois par jour, et organisées sous forme de courbe de charge.
Grâce au Big Data et à des algorithmes conçus pour détecter des incohérences, des alertes peuvent se déclencher lorsqu’un profil de consommation paraît anormal. Il peut s’agir, par exemple, d’une chute brutale de consommation ou d’un décalage entre l’énergie censée être distribuée et celle effectivement “retrouvée” dans un secteur.
Ce type de surveillance vise à repérer des comportements frauduleux, mais il a une conséquence directe : il peut aussi pointer des situations atypiques qui n’ont rien d’illégal. Autrement dit, le système traque des signaux, pas des intentions.
Et c’est précisément ce glissement qui alimente l’inquiétude. Car si la détection se base sur des modèles et des comparaisons, la vie réelle, elle, n’est pas toujours “modèle”. Un logement vide peut ressembler à une fraude. Une baisse de consommation peut être logique. Une incohérence locale peut venir d’un autre point du réseau.
Ce que prépare Enedis en 2025… et le détail qui change tout
Si le sujet monte autant, c’est parce qu’Enedis annonce une intensification nette de sa campagne. L’entreprise évoque un préjudice annuel de plus de 250 millions d’euros lié à la fraude, un montant classé dans les pertes dites non techniques par le régulateur.
Pour répondre à cette situation, Enedis prévoit de mener près de 30 000 contrôles en 2025, contre 12 000 en 2024. L’entreprise dit avoir doublé ses effectifs et prévoit de mobiliser 500 agents dès 2025 au service de cette lutte, au sein du réseau Enedis.
Et c’est ici que se situe le point qui fait réellement basculer la perception de beaucoup de foyers : plus la campagne s’étend, plus le risque de “faux positifs” devient une crainte concrète. Le cas de Sylvain V., cité par Le Journal du Net, illustre cette zone grise. Âgé de 64 ans, il s’est vu réclamer 1 500 euros après un soupçon de fraude, alors qu’il avait laissé son logement vacant entre 2021 et 2023, après le décès de sa mère en 2020.
L’association UFC-Que Choisir, par la voix de son président Jacky Hébert, dénonce justement ce qu’elle considère comme une inversion de la charge de la preuve : au lieu que l’entreprise démontre la fraude, le consommateur aurait, dans les faits, à prouver son innocence quand il est mis en cause.
Voilà pourquoi, derrière les chiffres et la lutte contre des trafics bien réels, des milliers de foyers redoutent surtout une chose : que la vague de contrôles de 2025 ne se contente pas de viser les fraudeurs… et qu’elle finisse aussi par bousculer ceux qui, eux, n’ont rien trafiqué.